[A] Créer et gérer des intrigues multiples

[Tsumire]

Hum...
Je crois reconnaître mon roman dans ta demande puisque certains me parlent d'un monde oignon (merci Daerel pour la jolie allusion ). De mon expérience, j'ai commencé à rédiger tête baissée, sans plan, sans synopsis, avec un fil de l'histoire assez décousu et à la moitié du premier tome, j'ai repris la totalité, mis à plat les intrigues, les dénouer et les renouer. Un vrai travail de fourmis...

Donc, je ne peux que te conseiller de bien préparer tes intrigues et leur recoupement avant de te lancer dans la rédaction, car j'ai payé les frais de la précipitation pour ma part. Une fois ton plan bien construit, tes personnages caractérisés, tu verras les difficultés internes à ce genre de récit en brique et vraiment, tu seras soulagée de savoir exactement où tu mets les pieds. Sinon, sans ce travail préalable, la réécriture te pend au coin du nez...

Sinon, comment j'ai procédé:

Je crois (ça date) m'avoir donné pour consigne de donner une finalité à chaque personnage principal. Je tenais à ce qu'ils ne se dérogent pas à leur caractère/ambitions/objectifs... Ensuite, j'ai dessiné l'univers de façon à ce qu'ils expriment au mieux et que leurs trames personnelles se recoupent au sein d'une intrigue principale et globale. Je crois qu'il y a eu des heures (et des heures) de discussion avec mon conjoint pour tout mettre au point. La discussion est vraiment une aide pour les intrigues multiples car il faut vraiment avoir un regard extérieur pour déceler les incohérences.

Edit : Je me souviens également avoir dessiner des frises chronologiques. Un vrai support utile ! Surtout si ton histoire se déroule depuis les confins de la création du monde...

[Ifuldrita]

Je me souviens également avoir dessiner des frises chronologiques. Un vrai support utile ! Surtout si ton histoire se déroule depuis les confins de la création du monde...

Ça, j'ai fait Voila une bonne chose !

[Selsynn]

Je déterre un vieux sujet (merci pour l'index, c'était une super initiative). Même pas honte !

En avancant dans mes corrections et dans mes projets de manière générale, je me rends compte que j'ai deux moyens de travailler.

Planifier l'histoire et quand je l'écris avoir des grosses baisses de motivations parce que je connais déjà tout => ne pas terminer d'écrire l'histoire. (solution tentée quelques fois qui ne me convainct pas du tout. Mais le résultat était directement de bonne qualité)

Planifier les très très grandes lignes de l'histoire et taïaut ! A l'écriture. Cela me permet de développer l'intrigue principale (en générale, la seule que je me sois donné un tant soit peu l'effort de détailler).
Au cours de l'écriture, je crée le monde autour de l'histoire et cela me donne plein de pistes d'intrigues secondaires.
Après je laisse reposer assez de temps pour savoir dans quel sens prendre l'affaire. (en l'occurence, ça été plusieurs années pour ETR, et même si le laps de temps a tendance à baisser, je pense que ce sera toujours au moins aussi long que le temps d'écriture).
Quand je fais les corrections, je commence avec Ze méthode qui me convient (trouvé victorieusement il y a deux mois ! Je suis encore dans l'euphorie d'avoir trouvé un support aux intrigues )
Je prends des feuilles A4 à petits carreau, en mode paysage, je laisse pas mal de place et je découpe en plusieurs colonnes : une colonne = un chapitre.
Ensuite les lignes représente chacune une intrigue différente.
Les couleurs permettent de faire le point : scène à ajouter, scène à corriger, scène OK.
Les scènes qui ne sont pas sur le planning sont à virer. (je crois que j'en ai encore laissé trainer une ou deux sur ETR).

La représentation visuelle permet de savoir quand une intrigue commence et quand elle finit, et de les réorganiser (ainsi d'éviter qu'elles commencent toutes en même temps dans le premier chapitre)
Cela permet de voir aussi si on ferme bien toutes les portes à la fin du premier tome (je l'ai mis en application pour une série de quatre tomes).

En mode écriture, je suis moins précise, je découpe juste en trois colonne : début, milieu, fin. J'ai fait ça pour les trois autres tomes pour voir bien où se terminent les intrigues lancé dans le tome 1 et si je pouvais en déplacer certaines dans d'autres tomes.

Le problème de cette méthode, c'est qu'en fait, le premier jet sert simplement de brain-storming à idée, et que rien ne reste après. Et que les corrections sont assez épuisantes !

[Ifuldrita]

C'est marrant que tu remontes ce sujet, car j'en suis arrivée à la même solution que toi !
J'utilise une feuille excel (je tape plus vite que je n'écris, et ça permet de remanier dans tous les sens ), chaque ligne pour un personnage, et le temps s'écoule au travers des colonnes !
Je suis arrivée à cette conclusion en janvier, mon premier post date de 2010... ça va pas vite dans mon cerveau

[Dea]

Je ne peux pas aider sur la méthode de construction, parce que les intrigues multiples coulent sur mon clavier sans que j'y puisse grand-chose et je sais qu'il est rare que j'ai besoin de reprendre l'intrigue à cause d'incohérence : mes persos se débrouillent toujours pour que leurs nouvelles actions interconnectées expliquent toutes leurs réactions antérieures. Je ne sais pas trop comment ils font, ni comment ma Muse s'y prend pour me guider, mais cela m'impressionne toujours.

Il y a cependant un domaine sur lequel j'aimerai témoigner : attention à la taille finale de vos récits !
Comme dit Selsynn, pour moi, l'idéal c'est d'arriver à fermer le plus de lignes avant la fin du tome.
Or, plus vous avez de trames, plus vous avez du mal à mener au bout chaque projet avant la fin du tome 1. Or, vous tomberez toujours sur quelqu'un qui vous dira "mais à quoi ça servait tout ces passages avec ce perso?" Et alors, vous répondrez : "ben c'est chronologique, tu comprendras l'importance du passage dans le tome 2". Et le BL de vous dire "oui, mais pour le tome 1, ça ne sert à rien. Vire. T'as déjà écrit un pavé". Et vous, désespérée, de pleurnicher "mais, si j'enlève, rien n'aura plus de sens dans le tome 2" Et votre gentil BL que vous avez pourtant envie d'étrangler : "ben, tu remettras tout ça dans le tome 2. Faut couper, faut couper." Et vous "bouhh ouhhhh bouhhhhh !!!!! mais comment tu veux que je mette ça dans le tome 2 puisque ça se passe avant !!!! les intrigues recoupent plus tard, je te dis !!! Tu comprendras !"
(la réplique fatale de l'écrivain avec une corde à la main et un tabouret sous les pieds, le "tu comprendras plus tard"...)

Bref, vous finissez par vous goinfrez de chocolats antidépresseurs
Et le pire, c'est que vous vous sentez comme un chien, quand vous donnez exactement le même conseil à une amie écrivaine, parce que chez elle, vous voyez bien que ça cloche dans la façon de garder le lecteur captivé et qu'il comprenne le sens de ce que vous écriviez au sujet de personnages encore loin de la trame principale, mais que dans voter propre récit, vous ne supporteriez pas qu'on vous dise cela...

Bref, les trames multiples, c'est à manier avec précaution.
C'est difficile à gérer.
Il faut tenter qu'elle se recoupe et qu'elle s'explique avant la fin d'une unité de volume, si possible, c'est moins périlleux ainsi.
Limiter les trames à 3 est un chiffre qui me parait raisonnable et permet déjà de jongler le temps d'acquérir assez d'habileté dans la technique.

[AngeDechu]

Je crains d'être allé un peu dans la complexité dans le bien, où il y a neuf intrigues différentes (toutes liées)

[Beorn]

Or, plus vous avez de trames, plus vous avez du mal à mener au bout chaque projet avant la fin du tome 1. Or, vous tomberez toujours sur quelqu'un qui vous dira "mais à quoi ça servait tout ces passages avec ce perso?" Et alors, vous répondrez : "ben c'est chronologique, tu comprendras l'importance du passage dans le tome 2". Et le BL de vous dire "oui, mais pour le tome 1, ça ne sert à rien. Vire. T'as déjà écrit un pavé". Et vous, désespérée, de pleurnicher "mais, si j'enlève, rien n'aura plus de sens dans le tome 2" Et votre gentil BL que vous avez pourtant envie d'étrangler : "ben, tu remettras tout ça dans le tome 2. Faut couper, faut couper." Et vous "bouhh ouhhhh bouhhhhh !!!!! mais comment tu veux que je mette ça dans le tome 2 puisque ça se passe avant !!!! les intrigues recoupent plus tard, je te dis !!! Tu comprendras !"
(la réplique fatale de l'écrivain avec une corde à la main et un tabouret sous les pieds, le "tu comprendras plus tard"...)

Je pense qu'il faut faire en sorte que ce passage ait deux fonctions : une fonction évidente dans ton tome 1, qui va servir une intrigue bouclée dans le tome 1 + une fonction cachée ou moins évidente, dont le sens deviendra évident dans le t2. Typiquement, ça pourra donner un "twist" (une re-lecture d'un même évènement sous un angle totalement nouveau) ou tout simplement une seconde conséquence inattendue de l'évènement.

Ex typique : dans l'oeuvre de Tolkien, la découverte de l'anneau unique par Bilbo.

Spoiler: montrer

Dans le roman "The hobbit", Bilbo trouve un anneau magique au cours du roman, ça le rend invisible et lui permet de vivre plein d'aventures.
Dans le SDA, on découvre 50 ans plus tard que cet anneau est maléfique à long terme et doit être détruit.
L'histoire de Bilbo reste cohérente et la scène de la découverte de l'anneau (la rencontre avec Gollum) parfaitement intégrée à cette première histoire, mais cette découverte a eu une seconde conséquence inattendue, qui a sa place toute trouvée dans un second roman.

Euh, je sais, c'est plut facile à dire qu'à faire. Mais ça reste la meilleure solution, àmha.

[Dea]

Merci Beorn pour tes conseils !
Je ne pensais pas que Tolkien avait déjà en tête sa suite quand il a écrit son premier tome, mais s'il avait déjà réfléchi à la suite des aventures de ses peuples, il est sûr qu'il a perçu l'importance de mettre des éléments à double sens en amont. C'est logique et c'est bien ce que nous faisons tous un peu.