[A] "Donner l'impression d'y vivre"

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desdenova
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Re: L'impression d'y vivre

Message par desdenova »

En effet, là, je vois mieux ce que tu veux dire.

Je pense que la réponse est déjà plus ou moins présente dans les messages de ce fil. Ca joue sur les détails anodins -- que ce soit de la vie de tous les jours, des pensées des personnages, etc. Des détails qui ne servent pas forcément l'histoire mais qui permettent d'enrichir l'univers dans lequel elle se déroule.

Par contre, c'est un exercice délicat, car on peut facilement sombrer dans l'excès et, du coup, lasser le lecteur.

Tiens, ça me fait penser à un texte lu récemment... Je pense qu'il contient aussi quelques éléments de réponse à cette question existentielle ;-)

http://annefakhouri.over-blog.com/artic ... 31154.html

Lisez... ça vaut le détour !

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Sytra
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Re: L'impression d'y vivre

Message par Sytra »

Je trouve ce sujet très intéressant. Il m'a poussé à réfléchir aux livres qui m'avaient donné cette impression "d'y vivre", et pourquoi ils y avaient réussi.

Dans mes lectures récentes, j'ai moi aussi Black Out qui m'a plongé complètement dans le Londres du Blitz. Pourtant, c'était une période historique que je ne connaissais pas du tout, en tout cas du point de vue de l'Angleterre. Le truc, je crois, c'est que je ne me suis pas imaginée Londres dans son entier, par contre j'avais l'impression d'être aux côtés de l'héroïne quand elle se réfugiait dans un abri souterrain pour échapper aux bombes. Ma lecture étant toute fraiche, je me souviens très bien que cette impression s'est construite progressivement. Je dirais donc qu'un point important pour arriver à ce sentiment "d'y vivre", c'est la répétition du lieu : les personnages y reviennent plusieurs fois, mais il ne se passe pas la même chose à chaque fois, ce qui nous permet de découvrir peu à peu le lieu sous des angles différents, d'enrichir par petite touche l'image que nous nous en faisons, jusqu'à aboutir à cette impression de le connaître aussi bien que les personnages.
Un autre point important selon moi, c'est aussi d'associer des sentiments au lieu. Dans Black Out, j'ai eu bien plus l'impression de vivre les bombardements avec les personnages que d'être aux côtés de l'une des héroïnes quand elle garde des garnements dans un manoir de campagne. Car dans les stations de métro, sous les bombardements, les sentiments sont très nombreux et forts. La peur bien sûr, mais aussi l'espoir, l'attente, parfois la joie. Ces endroits ont pris vie pour moi car les personnages y vivaient des moments forts, et que ces moments étaient intimement liés au lieu.

Un autre livre que j'ai lu récemment et qui m'a fait le même effet, c'est la Brume des Ténèbres de Patastec, quand il est passé en cycle. Quand on ressort de son livre, on ne connait pas grand chose de son monde. Et pourtant, on a eu l'impression de vivre aux côtés des personnages et l'image qu'on garde de quelques lieux nous donne l'impression qu'on pourrait y aller. Le truc important, selon moi, c'est que Patastec ne fait pas de grandes descriptions "classiques" (ou alors elles ne m'ont pas marquées), ou l'auteur décrirait consciencieusement tout ce qui se trouve dans une pièce, ou l'agencement d'un village. Elle nous décrit ce qui marque les personnages (et donc incidemment ce qui est le plus en mesure de marquer le lecteur), au moment où cela les marques. Je serais incapable de dire à quoi ressemble son Bourg, mais par contre je m'imagine parfaitement le jardinier en train de planter ses fleurs, la cuisinière en train de réprimander les chenapans qui lui ont volé des gâteaux, et toutes les bonnes odeurs qui sortent de sa cuisine, les orphelins en train de jouer autour d'une mare, etc. Je crois que si on veut donner l'impression à un lecteur de se trouver dans une pièce, il faut arriver à trouver ce qui caractérise vraiment la pièce, à quoi on penserait une fois qu'on en serait sorti et qu'on se la remémorerait. Ca peut passer par la vue, mais aussi par l'ouïe ou par le toucher. Et très souvent vous vous rendrez compte que ça passe par l'odorat.

Si je prends l'exemple de Harry Potter, je ne saurais pas dresser un plan de Poudlard. Par contre, j'ai l'impression d'y avoir vécu parce qu'il y a un certain nombre de pièces qui ont pris vie pour moi, mais chacune avait quelque chose de particulier pour la caractériser. La grande salle avec son plafond qui reflète le ciel, ses couloirs avec les escaliers qui bougent à leur guise, l'infirmerie avec ses lits à l'ancienne, les dortoirs avec leur grande cheminée et dans les chambres les lits à baldaquins, etc. Mais ce n'est pas tout, ces lieux prennent vie parce que les personnages vivent dedans et, d'une certaine manière, interagissent avec eux. S'ils ne faisaient qu'y passer, s'ils n'étaient pas eux-mêmes marqués par ces lieux, alors le lecteur ne le serait pas je pense.

(Oulà, je me suis montrée bien bavarde ! Preuve que cette thématique m'interpelle... :lect: )
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Lùani
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Re: L'impression d'y vivre

Message par Lùani »

On voit des scènes de la vie quotidienne, on sait où mène tel couloir, ce qu'il faut faire pour activer telle propriété du vaisseau, on a des personnages mis en scène dans leur quotidien, des petits passages inutiles à l'intrigue, mais qui plantent ce décor.
Les lieux sont appropriés par les personnages, et par là même par le lecteur.
J'ai eu cette même impression de connaitre chaque coursive avec le Battle Star Galactica (la série la plus récente : je suis fan).
Moi, ce qui m'a fait cette impression, c'est que chaque décor est intimement lié à une caractérisation de personnage.
J'ai adoré les personnages, et donc je me suis appropriée leurs lieux de vie : Le colonel Adama est un chef parfois rigide (austérité du poste de pilotage) mais qui est plein d'humanité dans l'intimité (cabine "chaleureuse" aux étagères peuplées de vieux livres). Je n'imagine pas Starbuck autrement qu'en train de taper le carton au mess, "Chef" en train de bricoler sur le pont d'envol (bruit, agitation) , la Cylon dans sa prison de verre etc... Ce qui fait que j'ai l'impression d'aimer les lieux parce que j'aime les persos.

C'est un peu la même chose avec Poudlard : chaque personnage à son lieu (Hagrid dasn sa cabane, Dumbeldore dasn son bureau, Rogue dasn le cachot qui sert de salle de TP pour les potions.), chaque "type d'action" à son lieu (le quidditch, la salle à manger, les toilettes des filles), et donc on à l'impression de s'approprier le décor en même temps qu'on s'identifie aux personnages.

Pas sûre d'être claire, là... :?

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Beorn
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Re: L'impression d'y vivre

Message par Beorn »

Tiens, voilà un sujet intéressant.
Je n'ai pas grand chose à ajouter. Comme d'autres l'ont dit avant moi, je pense que cette impression vient notamment du fait que les mêmes lieux (chambre, salle de classe, jardins, couloirs, passages secrets...) sont utilisés plusieurs fois dans des situations très différentes. Du coup, notre perception de ces lieux n'est plus associée à une scène ou une émotion précise, ils deviennent comme "indépendants".

J'ai un autre exemple avec l'université dans "Le nom du vent" de Patrick Rothfuss.
Site officiel
Bragelonne : Le 7ème Guerrier-Mage / Calame T1
Castelmore : Le jour où... / 14-14 / Un ogre en cavale / Lune rousse
Rageot : Le club des chasseurs de fantômes 1 et 2

desdenova
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Re: L'impression d'y vivre

Message par desdenova »

Beorn a écrit :J'ai un autre exemple avec l'université dans "Le nom du vent" de Patrick Rothfuss.
Absolument ! Quelle claque, cette série. J'ai hâte que sorte le troisième volume...

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Milora
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Re: L'impression d'y vivre

Message par Milora »

e dirais donc qu'un point important pour arriver à ce sentiment "d'y vivre", c'est la répétition du lieu : les personnages y reviennent plusieurs fois, mais il ne se passe pas la même chose à chaque fois, ce qui nous permet de découvrir peu à peu le lieu sous des angles différents, d'enrichir par petite touche l'image que nous nous en faisons, jusqu'à aboutir à cette impression de le connaître aussi bien que les personnages.
Ah oui, c'est vrai, doit y avoir ça, aussi !
Moi, ce qui m'a fait cette impression, c'est que chaque décor est intimement lié à une caractérisation de personnage.
Ah oui, ça doit être ça également... Ton explication ne colle pas aux exemples qui me viennent en tête (c'est pas forcément un personnage = une pièce), mais c'est vrai que l'appropriation de la pièce par le personnage, le fait qu'il la fréquente, qu'il la remarque, qu'il la traverse souvent, ça doit en imprégner aussi le lecteur...
Pas sûre d'être claire, là... :?
Si si !
les mêmes lieux (chambre, salle de classe, jardins, couloirs, passages secrets...) sont utilisés plusieurs fois dans des situations très différentes. Du coup, notre perception de ces lieux n'est plus associée à une scène ou une émotion précise, ils deviennent comme "indépendants".
Aaaah, oui, bien vuuu !


Désolée pour ce message inutile, c'est juste qu'en vous lisant tous les trois je me suis dit "aaaaah, ouiiii ! Il/elle a raison !", et je voulais le manifester, lol ^^
Jour de pluie dans une cuisine (Le Mammouth éclairé)

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