L'écrivain et son égo

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Milora
Exploratrice de l'espace temps aux mille auras et psychopompe à ses heures perdues
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Re: L'écrivain et son égo

Message par Milora »

Plume dans la palme est décidément ma section préférée du forum (j'aime les débats et les grandes discussions ^^ ) et j'ai pris grand soin de ne pas y venir ces derniers mois parce qu'il fallait que je travaille, du coup j'avais raté ce fil.
J'ai tout lu :love: Et même si le fil est vieux, j'avais envie de réagir sur certains posts :)

Vu que mon post est trop long, je vais donner mon avis (parce que je suis bavarde ^^) un peu hors contexte, pis après réagir aux trucs qui m'ont donné envie de cliquer sur "Répondre" :mrgreen:

En plus de tout ce que vous avez dit (je plussoie ci-dessous ^^), je trouve qu'y a aussi une donnée supplémentaire, qui donne envie aux auteurs d'être lus. C'est l'envie de faire vivre son texte. Pas du tout pour acquérir une reconnaissance sociale, pour briller soi-même, pas du tout pour qu'on sache que c'est vous qui l'avez écrit. Mais, juste, l'envie que le texte vive, parce qu'écrire c'est un acte de communication, et nos petits bébés n'existent complètement que s'il y a quelqu'un qui reçoit les mots dont ils sont formés.
C'est une vision un peu mystique de l'écriture ^^ Mais, si on écrit un texte, indépendamment de l'avis qu'on peut se forger sur sa qualité, on a envie qu'il soit lu, parce que quand on l'écrit, on le donne à autrui. On l'écrit, on le finit, et là, il n'est plus dans nous, il est "né", il existe par lui-même ; mais il n'existera complètement que s'il est lu, qu'il rentre dans l'imagination de quelqu'un d'autre, qu'il est transmis.
Et ça, c'est pas de l'égo. C'est une volonté d'être lu, mais qui n'a rien à voir avec la fierté que l'autre aime son texte, qui n'a rien à voir avec l'intention (consciente ou non) qu'on apprécie votre travail.
Personnellement, je ressens mon envie d'être lue comme ça, en tout cas. Et j'aime pas du tout quand quelqu'un fait l'amalgame entre l'envie d'être lu et l'envie d'être reconnu. :wamp:


Y a aussi certaines personnes qui ressentent, consciemment ou inconsciemment, le besoin de laisser quelque chose d'elles, non par envie de reconnaissance mais - attention, je sors les grands concepts de philosophie de comptoir - pour ne pas être tout à fait effacés par la mort. Ça a l'air ridicule dit comme ça, et je pense que très peu de personnes le ressentent consciemment, mais si on y réfléchit à fond, c'est pas si bête (arrêtez de ricaner ! :P ). J'ai croisé une camarade qui rédigeait sa thèse et qui me disait que, au fond, quand elle y réfléchissait vraiment sincèrement, son motif principal pour faire une thèse c'est qu'elle voulait laisser quelque chose d'elle pour la postérité. Pas pour être célèbre, mais juste pour qu'un petit bout d'elle (un petit bout qui est passé dans le travail qu'elle était en train de rédiger - une thèse c'est très personnel) soit toujours là et continue d'exister, quand elle-même n'y serait plus.
J'ai trouvé ça joli et je me suis dit que c'était peut-être plus répandu que ce qu'on croit, même si ça reste souvent de l'ordre de l'inconscient. Ecrire pour contrer la mort, tout ça :hihihi:
Bref, autre raison qui peut pousser à vouloir écrire et être lu, mais qui n'a rien à voir avec l'égo.

Booz a écrit :
Quant au sujet, pour ma part, je me positionne bizarrement. Tout d'abord, il faut savoir que je suis une sale co**e qui considère qu'il y a la littérature de divertissement et la littérature qui appartient au domaine des arts. Quand j’écris, j'essaie de viser la seconde ce qui me vaut beaucoup de problèmes (je passe beaucoup de temps à corriger mes textes, à trouver la tournure la plus juste possible, à chercher l'aspect poétique des mots ; souvent au détriment de l'action ce qui rend mes récits très contemplatifs (quand j’arrive à les terminer)). Pourquoi je parle de ça ? Parce que mon égo d'auteur est lié à cette vision de l’écriture et à ce but. Je ne cherche pas à être lue par beaucoup de monde, je veux toucher un certain genre de lecteurs (je ne dis pas que j’y arrive cependant).
Je comprends ta vision !
J'ai pas vraiment la même au sens où j'aime pas distinguer "littérature de divertissement" et "littérature artistique" : je pense qu'il ne s'agit pas de catégories mais d'une barre de mesure dont les deux pôles seraient "produit commercial" et "oeuvre d'art", et pour chaque livre, il s'agit de placer le curseur à un certain niveau de la barre de mesure. Parce que même les génies de l'art avaient des prétentions de vente de leur livre ou de plaire au mécène, et parce que même un livre apparemment de pur divertissement peut avoir été écrit avec les tripes.
C'est une autre question, certes, mais du coup j'avais envie de rebondir sur ta remarque et son lien avec "l'égo" : je crois que tu as mis le doigt sur quelque chose de très important (à mon sens). La différence entre
1) "écrire parce qu'on a envie de briller avec le résultat" et
2) "écrire par amour de l'écriture et par amour du résultat en lui-même" (le texte produit, et pas sa répercussion sur l'auteur, sur l'image de l'auteur aux yeux d'autrui).

Du coup, je pense que c'est là qu'on peut mettre la barre entre "auteur passionné" (état d'esprit qui a été évoqué par Crazy dans les deux premières pages de ce film), qui sera résolument dans le "2", et "auteur qui a un gros égo", qui sera carrément dans le "1" et qui va chercher à briller, à attirer l'attention, à faire parler de ses ouvrages, etc. C'est aussi la différence entre "mon texte, je l'aime" (2) et "mon texte, je l'ai réussi" (1).

J'aime bien la distinction que fait Beorn :
Beorn a écrit :Je pense que la question de l'ego est à dissocier de celle de la promo.

[...]

De mon côté, je côtoie énormément d'auteurs, publiés ou non, et je ne vois aucune différence à ce sujet avec le reste de la population. Au contraire, sur CoCy, je rencontre beaucoup de gens qui ont des doutes, l'humilité de faire relire leurs textes et de prendre des conseils, d'admettre qu'ils ont des choses à apprendre, etc.
Je vois même beaucoup de gens qui, au contraire de la vision de l'auteur égocentrique, manquent de confiance en eux, se trouvent nuls et désespèrent. Bien sûr, ceux-là font beaucoup moins de bruits que les casse-pieds qui crient partout que leur roman est génial, donc on a tendance à les oublier totalement et à ne voir que la partie émergée de "l'Iceberg auteurs".
Je trouve que c'est très vrai sur Cocyclics et aussi dans le petit monde des fans de SFFF qui montent des salons, des fanzines et des micro-éditions spécialisées. Il y a une sorte d'ambiance bonne-enfant et assez éloignée des gros égos "je suis un artiste", en règle générale.
Mais sortis de cet univers-là... C'est moins vrai... :?
Je viens d'une famille de libraires. J'ai aidé à tenir le stand au Marché de la Poésie de Paris et j'ai vu défiler des Auteurs (ils méritent une majuscule pour leurs égos... pas vraiment pour leur notoriété, généralement inversement proportionnelle) à la librairie, et je vois à travers la page FB de ma mère (page de libraire) passer beaucoup de petits auteurs, amateurs ou auto-publiés pour beaucoup, voire quelques uns publiés de façon classique.
Bon.
Ben là on est bien loin de ce que tu décris, Beorn :lol: J'ai le souvenir de cette dame qui a voulu me lire des poèmes à elle jusqu'à minuit (c'était en soirée) et qui, de toute évidence, voulait seulement minauder et briller mais n'attendait pas de vrai avis. De ces poètes qui défilent de stand en stand bien fiers de leur Oeuvre et snobant quiconque n'est pas du milieu. Graviter autour de ceux qui ont un peu de notoriété. Abreuver FB de pubs pour leurs ouvrages en espérant surtout des likes et des commentaires élogieux... et ce pas juste pour des questions de promotion froidement utilitaire, mais parce que comme ça ils éprouvent le sentiment d'être un Artiste.
Je pense que c'est plutôt à ce profil-là que faisait référence Crazy en ouvrant le fil, ou du moins c'est à lui que j'ai pensé.

Parce que ça, c'est pas la même chose que la confiance en soi de l'auteur (qui, comme vous dites, oscille généralement entre "ce texte est une merveille !" et "je n'ai jamais su écrire, ce texte serait rejeté à un AT de notices d'électroménagers..."). Cette confiance en soi en montagnes russes, elle va avec le processus de création et elle est assez courante. C'est pas du tout pareil que l'ego et le besoin d'attention, le besoin de briller, qui est favorisé par les réseaux sociaux.

Du coup, sur ça, je voulais ajouter deux choses :

- J'arrive plus à retrouver dans le fil qui a émis cette idée donc je cite pas, mais je plussoie beaucoup la personne qui a dit que les auteurs sont des gens comme les autres, et que parmi eux certains ont de gros égos - comme le reste des gens. Que, en gros, c'est pas propre à l'écriture. L'écriture est une création, c'est aussi un statut ("eh, vous avez vu, je suis un Artiste", "les gens aiment ce que je fais : j'ai, à travers leurs yeux, de la valeur").
Mais du coup il me semble que les personnages d'auteurs à gros égos ne sont pas répartis équitablement selon les branches de la littérature - parce que c'est pas la même "légitimité d'artiste" qui, dans l'imaginaire collectif, est rattaché à l'auteur. La littérature SFFF c'est beaucoup de passionnés, de gens qui aiment bien être "en dehors du monde" (en imaginant des mondes alternatifs, en appréciant une littérature généralement dépréciée, en acceptant le qualificatif de "geek"). Du coup on croise moins de gens à gros égo que, par exemple, dans le monde des poètes amateurs. Parce que la poésie va avec le mythe de l'Inspiration, de l'Artiste, du Talent, du poète maudit qui passe à la postérité des années plus tard.
C'est fou, mais ça se retrouve au niveau des forums d'écriture : en plus de Cocyclics, je suis impliquée sur un autre (Le Monde de l'Ecriture), généraliste, qui dispose d'une section Poésie. J'y suis modératrice et... autant vous dire que la plupart des clashs littéraires nous viennent de la section poésie : les membres y acceptent plus difficilement les critiques, qui y font le plus montre d'un égo bien visible et facilement froissé. (Je ne stigmatise pas tous les poètes amateurs ni tous les utilisateurs de cette section du forum, bien sûr :lol: Je parle juste en général).
Du coup, moi j'aime bien le monde de la SFFF :sifflote:


- En fait, je rejoins beaucoup Florie :
Florie a écrit : Je me demande si on ne s'emmêle pas entre plusieurs sujets au final, qui sont liés, bien entendu, mais peuvent amener des discussions différentes:
d'un côté il y a l'ego, la confiance en soi, la personne derrière les écrits, le besoin d'attention et de compliments que certains peuvent ressentir et faire ressentir à leur audience ;
d'un autre côté il y a la promotion, ou la visibilité si le terme "promotion" n'est pas adapté, c'est à dire avoir envie de partager ses écrits, de les faire connaître, d'avoir des lecteurs avec qui échanger, attirer l'attention d'un éditeur peut-être ;
et enfin, il y a aussi tout ce qui est réseaux sociaux, le temps que ça prend de s'y consacrer, comment ils peuvent nourrir l'ego en positif ou en négatif.
Oui, c'est trois choses différentes.
Je pense quand même que les réseaux sociaux, globalement, poussent à la mise en avant de soi, qu'ils titillent l'envie de briller, de mesurer au nombre de likes combien on vous aime, combien vous avez du succès aux yeux des autres. C'est pour ça que le fonctionnement me dérange (je préfère fondamentalement le système d'un forum, auquel chacun contribue dans une idée d'échange, par rapport à un réseau social où il s'agit de se montrer et de récolter des commentaires).
En gros, pour ne pas s'éloigner du sujet, je crois que le phénomène de la personne qui veut briller (typiquement : à travers son livre, son poème, son texte) est encouragé, exacerbé et mis en évidence par les réseaux sociaux. Le fait que 25 personnes vous disent "j ador c magnifique tu as bcp de talent !!!!" et que 50 clignent sur "like", ça peut tourner la tête.
Attention, je dis pas du tout que quiconque utilise les réseaux sociaux a un égo démesuré ! Mais je trouve qu'ils rendent plus visibles les cas d'égos à grandes dimensions et qu'ils peuvent encourager à aller dans cette direction. Et que c'est pour ça que le thème est si souvent revenu dans la conversation.
Ça reste, cela dit, un symptôme du problème et pas le problème en lui-même (enfin je sais pas si on peut parler de "problème" pour un trait de caractère, mais moi les gros égos me tapent sur le système assez vite ^^ )


Donc en gros, à mon avis, il n'y a pas d'égo d'auteur, il y a l'égo des personnes qui, au passage, s'avèrent être des auteurs.

En ce sens, je voulais faire une petite parenthèse qui s'éloigne un chouia du sujet donc je le mets en spoiler :
Spoiler: montrer
desienne a écrit :Je crois aussi que l'égo est un moteur, qu'il est utile pour avancer, nécessaire pour franchir les obstacles, indispensable pour se dépasser.
Je suis profondément en désaccord avec ça ! :hihihi: Je trouve même que la généralisation de cette idée reçue est un problème de la société actuelle. (Je ne te vise pas du tout Desienne, et, individuellement, on a tout à fait le droit d'être comme tu le décris ; ce qui me gêne c'est les gens qui considèrent que c'est une règle absolue). Parce que ça pousse à l'individualisme et à la mise en avant de soi, et que ça laisse sur le carreau les gens qui n'ont pas ce fonctionnement (pareil : je ne parle absolument pas de toi Desienne, mais des fois où j'ai croisé ce raisonnement, en particulier dans ma vie professionnelle).
Personnellement, je suis tout le contraire : j'aime faire les choses pour l'amour de l'art, pour elles-mêmes, et absolument pas pour m'en sentir fière ou parce qu'on a froissé mon égo et que je veux montrer que je peux faire mieux. Je ne dis pas du tout que c'est mieux, ni moins bien. Mais on a souvent tendance à oublier que ces caractères aussi existent, et que ce n'est pas pour ça qu'ils font les choses moins bien. ^^
Du coup, non, je ne trouve pas que l'égo soit un moteur nécessaire et indispensable. Personnellement, je trouve que c'est une partie de soi que chacun doit apprendre à connaître et à contrôler. Je peux comprendre qu'on le voie autrement et qu'on le transforme en moteur bénéfique pour avancer. Mais j'aime pas beaucoup qu'on en fasse une règle générale :?
Ceci dit, peut-être que j'extrapole à partir de ta formulation et que, dans ta phrase, on pouvait remplacer égo par "envie de bien faire", auquel cas ça me chafouine moins :roll:
(Je répète que je ne te vise absolument pas, je m'appuie plutôt sur les fois où, dans ma vie, j'ai croisé ce genre d'arguments :love: )
Jour de pluie dans une cuisine (Le Mammouth éclairé)

Anonyme_Quatre

Re: L'écrivain et son égo

Message par Anonyme_Quatre »

Pas grand chose à rajouter, surtout pour dire que j'ai trouvé ton pavé intéressant x)

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Esteve Joan de Lleó
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Re: L'écrivain et son égo

Message par Esteve Joan de Lleó »

Je partage totalement ton analyse.
Milora a écrit :Mais du coup il me semble que les personnages d'auteurs à gros égos ne sont pas répartis équitablement selon les branches de la littérature - parce que c'est pas la même "légitimité d'artiste" qui, dans l'imaginaire collectif, est rattaché à l'auteur. La littérature SFFF c'est beaucoup de passionnés, de gens qui aiment bien être "en dehors du monde" (en imaginant des mondes alternatifs, en appréciant une littérature généralement dépréciée, en acceptant le qualificatif de "geek"). Du coup on croise moins de gens à gros égo que, par exemple, dans le monde des poètes amateurs. Parce que la poésie va avec le mythe de l'Inspiration, de l'Artiste, du Talent, du poète maudit qui passe à la postérité des années plus tard.
Et surtout, dans l'inconscient collectif, la SFFF ça n'est pas de la littérature. C'est au mieux du divertissement de qualité. Le critère majeur de la "qualité" d'une œuvre SFFF c'est la richesse du monde créé, ça n'est jamais le style ou la maîtrise littéraire. Les "modèles" sont d'ailleurs toujours des best-sellers, rarement des auteurs reconnus pour la qualité du texte.
C'est sans doute lié au fait que les exemples récurrents sont presque toujours de langue anglaise. De Tolkien à Rolling, en passant par Poul Anderson, on ne peut pas juger (nous lecteurs francophones, pour les anglophones ça peut être différent) de la qualité des textes, uniquement, et éventuellement, de la qualité des traductions. En dehors de ce "petit club", qui connaît Stéphan Wul ? Et ceux qui le connaissent se souviennent-ils de son style ou de ses mondes ? Ou de son véritable nom ?
Je me rappelle Niourk, ou les Oms, mais suis-je capable de citer ne serait-ce qu'une phrase de Wul ? Non. Définitivement non. Mais je me souviens du Lac de Lamartine ou de Mignonne, allons voir si la rose... Pas parce que c'est mieux, mais probablement parce qu'on nous l'a enseigné, parce que ça, mes amis, c'est de la "vraie littérature". That's it.
(Bon OK, faut reconnaître que Le lac ça déchire grave, gals and pals).

Peut-on donc parler d'ego lorsqu'on aborde la SFFF ? Pas sûr. Malgré les succès populaires (terme très souvent péjoratif, d'ailleurs), la SFFF n'est pas prête de revendiquer un Nobel ou un Goncourt.
Tout au plus l'ego pourrait-il se mesurer à la volonté de réussite commerciale d'une œuvre devenue produit, et ce faisant, perdant de sa qualité intrinsèque.
Pourtant, il existe des œuvres reconnues (Babylon babies) dont la qualité littéraire est réelle, le style souvent décrié (ce qui constitue à mon sens une preuve de qualité) mais qui n'est "que" de la SF, et donc déconsidérée... RIP M.G. Dantec.
C'est fou, mais ça se retrouve au niveau des forums d'écriture : en plus de Cocyclics, je suis impliquée sur un autre (Le Monde de l'Ecriture), généraliste, qui dispose d'une section Poésie. J'y suis modératrice et... autant vous dire que la plupart des clashs littéraires nous viennent de la section poésie : les membres y acceptent plus difficilement les critiques, qui y font le plus montre d'un égo bien visible et facilement froissé. (Je ne stigmatise pas tous les poètes amateurs ni tous les utilisateurs de cette section du forum, bien sûr :lol: Je parle juste en général).
Du coup, moi j'aime bien le monde de la SFFF :sifflote:
Ayant plus d'expérience de création dans la poésie (souvent dans un contexte SFFF, d'ailleurs) que dans les romans/nouvelles, je ne puis qu'approuver/confirmer.
La "qualité poétique" se mesure facilement (prosodie classique), du moins le croit-on : des critères très stricts existent, la création devient technique, et les règles doivent être respectées. Lorsqu'on les maîtrise, on peut s'autoriser les entorses aux règles (Picasso savait dessiner, avant de "sombrer" dans le cubisme). Le problème est que beaucoup, en "littérature poétique", se contentent de quelques rimes pauvres, quand ce ne sont pas des assonances, abusent de métaphores ou au contraire en sont incapables, et ignorent toutes autres contraintes liées à la prosodie classique. Néanmoins s'auto-proclament-ils poètes : ils s'autorisent, au nom de la "Poésie", et donc de la "liberté de créer", ce que Raimbaud ou Hugo pouvaient se permettre. Mais eux, au moins, avaient-ils largement fait leurs preuves auparavant, tout en s'astreignant à ces maudites règles de prosodie.
Quand un poème est nul, il est nul : inutile d'établir un pseudo-lien avec Picasso ou pire encore van Gogh, souvent décriés en leurs temps, unanimement reconnus aujourd'hui. Ce qui est nul ne devient pas génial avec les années... Pour autant, si on n'aime pas un poème amateur, c'est "paske on konpran rien à la vrai poési !", mais jamais parce que le prétendu poème pourrait tout autant sortir d'un tirage aléatoire de mots, du moment qu'ils riment "à peu près".

Honnêtement (mais subjectivement), l'essentiel de la création "poétique" commise par des amateurs n'est que du pipi de chat, prétentieux, convenu, et affligeant.
A contrario, je n'ai jamais vu une œuvre SFFF amateure irrécupérable : on y trouve toujours de la qualité (style, imagination, ambiance, monde, parfois plusieurs critères réunis). Les auteurs SFFF sont avant tout des passionnés du genre, et non des gens qui pensent d'emblée pouvoir révolutionner le genre sans avoir comme moindre référence les illustres auteurs qui les ont précédés.
Autrement dit, beaucoup de "poètes amateurs" n'ont jamais lu Le bateau ivre ou Les étrennes des orphelins, mais très peu d'auteurs SFFF n'ont jamais lu Verne, Tolkien, Kafka ou King (pas forcément les 4, mais au moins 2 d'entre eux).

Bref, en SFFF comme ailleurs il peut sans doute y avoir des auteurs imbus d'eux-mêmes, mais ça n'est probablement pas de l'ego lié à leur prétendue qualité d'auteur, plus à leur personnalité.
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Axolotl-a-besicles
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Re: L'écrivain et son égo

Message par Axolotl-a-besicles »

Esteve Joan de Lleó a écrit : Ayant plus d'expérience de création dans la poésie (souvent dans un contexte SFFF, d'ailleurs) que dans les romans/nouvelles, je ne puis qu'approuver/confirmer.
La "qualité poétique" se mesure facilement (prosodie classique), du moins le croit-on : des critères très stricts existent, la création devient technique, et les règles doivent être respectées. Lorsqu'on les maîtrise, on peut s'autoriser les entorses aux règles (Picasso savait dessiner, avant de "sombrer" dans le cubisme). Le problème est que beaucoup, en "littérature poétique", se contentent de quelques rimes pauvres, quand ce ne sont pas des assonances, abusent de métaphores ou au contraire en sont incapables, et ignorent toutes autres contraintes liées à la prosodie classique. Néanmoins s'auto-proclament-ils poètes : ils s'autorisent, au nom de la "Poésie", et donc de la "liberté de créer", ce que Raimbaud ou Hugo pouvaient se permettre. Mais eux, au moins, avaient-ils largement fait leurs preuves auparavant, tout en s'astreignant à ces maudites règles de prosodie.
Quand un poème est nul, il est nul : inutile d'établir un pseudo-lien avec Picasso ou pire encore van Gogh, souvent décriés en leurs temps, unanimement reconnus aujourd'hui. Ce qui est nul ne devient pas génial avec les années... Pour autant, si on n'aime pas un poème amateur, c'est "paske on konpran rien à la vrai poési !", mais jamais parce que le prétendu poème pourrait tout autant sortir d'un tirage aléatoire de mots, du moment qu'ils riment "à peu près".

Honnêtement (mais subjectivement), l'essentiel de la création "poétique" commise par des amateurs n'est que du pipi de chat, prétentieux, convenu, et affligeant.
A contrario, je n'ai jamais vu une œuvre SFFF amateure irrécupérable : on y trouve toujours de la qualité (style, imagination, ambiance, monde, parfois plusieurs critères réunis). Les auteurs SFFF sont avant tout des passionnés du genre, et non des gens qui pensent d'emblée pouvoir révolutionner le genre sans avoir comme moindre référence les illustres auteurs qui les ont précédés.
Autrement dit, beaucoup de "poètes amateurs" n'ont jamais lu Le bateau ivre ou Les étrennes des orphelins, mais très peu d'auteurs SFFF n'ont jamais lu Verne, Tolkien, Kafka ou King (pas forcément les 4, mais au moins 2 d'entre eux).

Bref, en SFFF comme ailleurs il peut sans doute y avoir des auteurs imbus d'eux-mêmes, mais ça n'est probablement pas de l'ego lié à leur prétendue qualité d'auteur, plus à leur personnalité.
Oh yayaïe... Je ne reviens pas sur la partie "SFFF" souvent vue comme sous-littérature ou simplement méconnue, parce que c'est hélas vrai et pas vraiment le sujet ici, ni sur le fait qu'elle est du coup, l'oeuvre de passionnés du genre "tombés dans la marmite quand ils étaient petits".
Ce qui m'interpelle c'est que tu confirmes tous mes a priori sur le milieu poétique... Que je n'ose pas fréquenter de ce fait, parce que moi quand je me suis rendue compte que si, si, j'étais bel et bien capable d'écrire un poème, j'ai commencé par ressortir mes manuels de français du lycée pour vérifier la définition de la rime et celle du vers... A aucun moment je n'ai imaginé que je pouvais me lancer dans cette partie hautement technique de la littérature sans posséder les outils ! Et mes rares essais de vers libres n'ont rien donné, justement car je n'ai pas la technique d'un Rimbaud pour me permettre de briser les règles !
Donc je crois que je n'ai pas trop d'égo... Ce qui me pousse d'ailleurs à travailler, parce que je ne suis jamais satisfaite et que j'ai toujours envie d'explorer de nouveaux axes. Quand je me suis lancée dans le haïku (après avoir recherché les règles japonaises d'origine et lu des traductions, y compris les notes sur la difficulté de passer au français), c'était un défi né de ma passion pour la culture du Japon, avec la contrainte d'écrire en français et donc tous les problèmes que ça pose, car je ne maîtrise pas le japonais.
Et en fait, je fonctionne beaucoup au défi :
Tiens, j'ai une nouvelle idée supergéniale mais (comme d'habitude) très compliquée à rendre correctement surtout compte tenu de mes capacités d'écriture actuelles : est-ce que je suis capable d'y arriver ?

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