Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

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Milora
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Milora »

Je suis surprise par ce fil ! C'est "drôle", je n'aurais jamais pensé qu'on puisse souffrir du syndrome de l'imposteur pour une passion (je ne l'avais tout bonnement pas envisagé).

Je suis une graaaaaande habituée du syndrome de l'imposteur dans ma vie professionnelle. Je fais de la recherche, je viens de finir un doctorat : une branche où vous êtes constamment ramené au statut de "bébé chercheur" pas pris au sérieux par les autres, où le degré d'excellence exigé est proprement inhumain, où on ne vous dit quasiment jamais que ce que vous faites est bien (du moins dans ma branche).
Et c'est "amusant" parce que, finalement, mon activité professionnelle ressemble un peu, dans ses modalités, à l'écriture : je dois produire des livres et des articles, les faire publier, et puis parler à des conférences (et y faire du réseau pour qu'on m'associe à des projets de recherche bons pour le CV), en gros. C'est souvent comme un AT : on voit un thème, on a une idée d'article scientifique dessus, on l'écrit, on l'envoie, on attend un oui ou un non puis des corrections éditoriales...
Et tout ça, professionnellement, génère d'immenses blocages chez moi. Là en ce moment, j'ai un gros syndrome de la page blanche pour un article que je dois rendre dans 10 jour (et j'ai pourtant toutes les données). J'ai pris 6 mois de retard dans le rendu de ma thèse pour la même raisons (l'impression que c'est indigne d'être lu, que ça n'est même pas à 10% du niveau attendu, qu'on n'a eu les précédentes félicitations universitaires qu'à cause de x ou y raisons indépendantes de la qualité de notre travail...).
Bref, le truc classique.


Je n'y ajoute pas la peur de l'échec puisque, dans la vie, ma devise est cette citation de Guillaume d'Orange qui permet de se lancer dans tout et n'importe quoi juste par amour de l'art :
"Il est inutile d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer".


Ça a l'air bête comme ça cette phrase, mais je trouve que c'est une super façon 1- de se prémunir des douleurs de l'échec et de sa peur, et 2- d'aimer faire ce qu'on fait pour le seul fait de le faire, et pas dans l'espoir d'avoir une reconnaissance (d'autrui ou de soi) à la fin, ce qui donne plein de couleurs et de beauté à des activités qui autrement peuvent être vécues comme des corvées auxquelles on sacrifie pour arriver à un but final.

Par contre, pour l'écriture, mais alors PAS.DU.TOUT. En fait, je n'arrive même pas à concevoir l'écriture en termes de réussite ou d'échec. Il n'y a aucun "niveau attendu". Un oui à un AT ne veut pas dire qu'on est un génie, un non à un AT ne veut pas dire qu'on est mauvais. L'édition, c'est pareil : même publié par une grosse maison, un lecteur pourra trouver que le bouquin est vraiment nul.
Parce qu'on ne "produit" pas, on fait de l'art.
Retirez-y toute dimension mystique ou intello, ça n'est pas ce que je veux dire. Je fais référence au fait que quand on écrit, on fabrique quelque chose d'intrinsèquement subjectif : on écrit ce qu'on aime. On est apprécié quand la sensibilité du lecteur rejoint la vôtre. Le baromètre ne peut pas être extérieur, ça ne peut pas être une instance qui vous donnerait plus de reconnaissance que vous n'en méritez, il n'y a pas de niveau "c'est bon, j'ai acquis la compétence" : même en sachant très bien écrire, on peut toujours écrire un truc tout nul, parce que ça va comme ça tombe, quand il s'agit de créativité.
À partir de là, le seul étalon de mesure, c'est soi-même.

Je crois que ce qui le semble le plus libérateur, dans l'écriture, c'est justement cette absence de jugement "d'en haut". La qualité, on s'en fiche. Ca ne veut pas dire qu'on veut écrire de mauvais textes par je-m'en-foutisme. Non, ça veut dire que le bonheur de l'écriture réside dans l'acte-même d'écrire. Si le texte est raté mais qu'on a passé un heureux moment à l'écrire, alors il n'est pas un échec. S'il est raté mais qu'on a appris quelque chose au passage, alors il n'est pas un échec. En fait, l'écriture ne peut être un échec que quand on perd de vue l'acte d'écrire en lui-même. Je sais pas si je suis très claire ?

Je pense que se demander si on est un écrivain (qu'on voie ça comme une compétence professionnelle ou comme une figure "cool" de l'artiste) ça n'a pas trop trop de sens : c'est des catégories qu'on ne peut pas définir objectivement. Pour certains, vous publiez une nouvelle dans le journal de l'école et vous êtes un écrivain. Pour d'autres, vous n'êtes pas un vrai auteur si vous êtes pas auteur de best-sellers. Ce qui compte ça n'est pas soi-même, ça n'est pas la personne qui a écrit le livre/la nouvelle. Quand on écrit ou quand on lit, la seule chose qui compte, c'est le texte. J'ai envie de dire : peu importe le fait de se sentir ou pas "parmi les grands", parmi les qualifiés, les compétents, parce que chaque texte est lu pour lui-même, et c'est pas parce qu'on en a publié plus ou qu'on a eu des fans plus enthousiastes, qu'on est "meilleur" que si on n'avait pas eu de lecteurs... J'ai du mal à exprimer mon idée, là. Je sais pas si vous voyez ce que je veux dire. En gros, en art, y a pas de "niveau" : y a juste de l'expression. (ce qui ne veut pas dire qu'y a pas de technique, mais c'est pas la même question).

Dans l'ensemble, je crois que la seule façon de se sortir du syndrome de l'imposteur, quel que soit le domaine, ça n'est pas de s'améliorer ou de se convaincre qu'on est bon. C'est d'arrêter d'essayer de le savoir. Parce qu'au fond, on s'en fiche, dans la vie : y a pas de podium, pas de classement, pas même au boulot. Tant qu'on ne vous accuse pas de faute professionnelle, y a pas de raison de se demander si on est "assez" bon... Je crois vraiment que c'est la seule façon de se sortir de la boucle délétère du syndrome de l'imposteur (sans risquer de tomber dans l'extrême inverse, qui est encore plus horripilante : l'arrogance).

Après, évidemment, c'est juste un avis !
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Elikya
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Elikya »

Je traverse parfois des périodes pendant lesquelle je souffre du syndrome de l'imposteur. Il suffit d'une mauvaise critique, d'un refus, ou de l'impression de ne pas être à ma place en salon.

J'ai peu de conseils à partager en la matière : je collecte les bons retours pour les relire en cas de coup de blues, je me raccroche aux ami(e)s pour me sentir plus à l'aise, j'essaie de ne pas prendre mes romans trop au sérieux et de ne plus espérer.

Voici un article de Neil Jomunsi sur le syndrome de l'imposteur, mais qui l'aborde sous un angle différent : celui de notre capacité à prendre notre activit au sérieux et à nous imposer dans le secteur de l'édition.

https://page42.org/syndrome-de-l-impost ... u-serieux/

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sherkkhann
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par sherkkhann »

Ça a l'air bête comme ça cette phrase, mais je trouve que c'est une super façon 1- de se prémunir des douleurs de l'échec et de sa peur, et 2- d'aimer faire ce qu'on fait pour le seul fait de le faire, et pas dans l'espoir d'avoir une reconnaissance (d'autrui ou de soi) à la fin, ce qui donne plein de couleurs et de beauté à des activités qui autrement peuvent être vécues comme des corvées auxquelles on sacrifie pour arriver à un but final.
Non, ça veut dire que le bonheur de l'écriture réside dans l'acte-même d'écrire. Si le texte est raté mais qu'on a passé un heureux moment à l'écrire, alors il n'est pas un échec. S'il est raté mais qu'on a appris quelque chose au passage, alors il n'est pas un échec. En fait, l'écriture ne peut être un échec que quand on perd de vue l'acte d'écrire en lui-même. Je sais pas si je suis très claire ?
Je te rejoins à 200% Milora : c'est exactement la vision que j'ai de l'écriture ou de toutes autres activités.

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desienne
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par desienne »

À partir du moment où l'on fait les choses avec son cœur, il n'y a pas d'imposture. :love:

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NaNa
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par NaNa »

Sytra a écrit :
jeu. oct. 19, 2017 4:45 pm
Agathe Flore a écrit :
jeu. oct. 19, 2017 4:30 pm
À mon avis, le syndrome de l'imposteur vient d'abord de l'éducation qu'on a reçue : des parents et profs hyper exigeants, jamais contents, ou qui dénigrent sans cesse. Ensuite, dès qu'un pan de notre vie ne va pas bien, le syndrome de l'imposteur contamine tous les autres domaines.
Permet-moi de ne pas être tout à fait d'accord avec ça. L'éducation joue sans doute un rôle (en ce qui me concerne, ce fut un rôle très positif quant à ma confiance en moi pour le boulot, j'en suis consciente). Mais le syndrome de l'imposteur ne nait pas forcément d'une hyper exigence et/ou de dénigrements incessants de la part de personnes extérieures. L'exigence peut venir de soi-même, parce que c'est un domaine qui nous tient à cœur et qu'on veut y être bon (et qu'on a l'impression de ne pas l'être assez).
Tout à fait d'accord. Perso, je n'ai pas eu des parents ni des profs jamais contents, et pourtant... Pour l'instant, je n'ai ressenti le syndrome de l'imposteur que dans les études (mais ça viendra sûrement un jour dans l'écriture si je suis publiée dans une vraie maison d'édition; pour l'instant j'ai "juste" un complexe d'infériorité à ce niveau-là), mais ça vient de moi. Ca vient de deux choses : l'impression que je n'en sais pas assez et que d'autres sont plus légitimes que moi, et le fait que j'ai toujours eu beaucoup de facilités à l'école, du coup je travaillais moins que les autres en ayant de meilleurs résultats et ça me donne l'impression que c'est injuste et que c'est une imposture (surtout quand on me félicite).

Pour ce qui est de la peur de l'échec, pareil, ça vient de moi aussi. Comme ça me tient à coeur, j'ai envie que tout soit parfait du premier coup, et ça me bloque. Actuellement, je suis bloquée sur ma trilogie, parce que j'ai recommencé plusieurs fois vu que ça ne me plaisait pas, et que j'en ai tellement marre que j'ai peur de recommencer encore une fois pour me dire que ça ne va toujours pas. Mais bon, je suis censée finir le premier jet avant la fin de l'année, alors va falloir que je dépasse tout ça :fouet: .
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Sandrinoula »

Milora a écrit :
jeu. oct. 19, 2017 6:51 pm
Je fais référence au fait que quand on écrit, on fabrique quelque chose d'intrinsèquement subjectif : on écrit ce qu'on aime. On est apprécié quand la sensibilité du lecteur rejoint la vôtre. Le baromètre ne peut pas être extérieur, ça ne peut pas être une instance qui vous donnerait plus de reconnaissance que vous n'en méritez, il n'y a pas de niveau "c'est bon, j'ai acquis la compétence" : même en sachant très bien écrire, on peut toujours écrire un truc tout nul, parce que ça va comme ça tombe, quand il s'agit de créativité.
À partir de là, le seul étalon de mesure, c'est soi-même.
:love: :love: :love: Ton message va constituer en lui-même un superbe remède à ce "syndrome", c'est très clair et frappé du bon sens. (Et ça va m'aider à encaisser les mauvaises critiques ^^.)
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Morgane »

Milora a écrit :
jeu. oct. 19, 2017 6:51 pm
Je suis surprise par ce fil ! C'est "drôle", je n'aurais jamais pensé qu'on puisse souffrir du syndrome de l'imposteur pour une passion (je ne l'avais tout bonnement pas envisagé).
Comme quoi, c'est vraiment une histoire de perception. Pour ma part, je pensais que c'était un syndrome qu'on retrouvait principalement dans le monde artistique. à la réflexion, je me dis que c'est peut-être une question d'attentes et d'importance que l'on donne à une activité.

Je m'explique : mon travail m'importait peu, cela n'a jamais été qu'un moyen de vivre et une équation simple. Il me faut travailler efficacement pour passer moins de temps au travail et toucher le même salaire. Aucun investissement émotionnel, juste un investissement en temps. Du coup, complexer n'est pas même pas en question. D'ailleurs à la réflexion, je suis très bon en entretiens de recrutement, parce que justement je suis sûr de moi, alors que je suis quelconque à l'oral habituellement. Je pense que ça vient de là : je m'en fous, mais je connais mon sujet.

En revanche, l'écriture... J'y mets tout ce que j'ai et donc je suis beaucoup plus sensible sur ce sujet qui, comme tu le dis, est beaucoup plus complexe à juger.

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Milora
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Milora »

:love: Sandrinoula.

Et tope-la, Serk' ^^
Dorian Lake a écrit :
ven. oct. 20, 2017 7:43 am
je me dis que c'est peut-être une question d'attentes et d'importance que l'on donne à une activité.

Je m'explique : mon travail m'importait peu, cela n'a jamais été qu'un moyen de vivre et une équation simple. Il me faut travailler efficacement pour passer moins de temps au travail et toucher le même salaire. Aucun investissement émotionnel, juste un investissement en temps. Du coup, complexer n'est pas même pas en question. D'ailleurs à la réflexion, je suis très bon en entretiens de recrutement, parce que justement je suis sûr de moi, alors que je suis quelconque à l'oral habituellement. Je pense que ça vient de là : je m'en fous, mais je connais mon sujet.

En revanche, l'écriture... J'y mets tout ce que j'ai et donc je suis beaucoup plus sensible sur ce sujet qui, comme tu le dis, est beaucoup plus complexe à juger.
Ça doit jouer dans certains cas... J'ai tendance à penser que si le syndrome de l'imposteur est à ce point répandu de nos jours, ça doit venir d'une culture de l'entreprise et de la réussite individuelle qui nous inculque le mythe de l'excellence (qui en réalité est discutable, subjective et en fait, inaccessible). Une sorte de décalage entre les attentes affichées et la réalité. Ça pousse à vouloir se surpasser, à vouloir faire des heures sup' pour être bon/meilleur, ça valorise l'ambition... et crée du malaise. Sans doute. (Encore une fois, c'est un simple avis personnel).
Justement, tout ça ne se retrouve pas dans le monde de l'écriture (du moins à nos niveaux, je ne sais pas quelle est la pression qui repose sur un auteur de best-seller qui a des exigences de productivité réussite). D'où ma surprise en voyant tant de monde en souffrant, dans ce fil.

En revanche, ce que tu décris n'est pas la condition sine qua non à ce fameux syndrome de l'imposteur.
Dans mon cas, en tout cas, ça n'est pas vraiment ça. Comme toi, c'est dans l'écriture que je mets "mes tripes" et je ne veux pas sacrifier ma vie à mon travail. Mais dans ma vie professionnelle, il faut que ce que je fais soit validé ou invalidé par des instances extérieures qui vont juger non seulement ma production mais aussi mon CV et mes compétences. En plus de ça, le monde universitaire fonctionne énormément par jeux d'influence, donc c'est pas parce que vous décrochez un CDD que vous êtes la personne la plus adéquate pour le poste : ça veut souvent dire que quelqu'un d'influent dans le milieu a misé sur vous et décroché son téléphone pour parler au recruteur ou que quelqu'un dans le jury de recrutement vous connait (grosso modo). D'où un gros sentiment d'imposture.
Dans l'écriture, je ne retrouve pas du tout ça. Justement, parce que j'écris ce que je veux, en y mettant mes tripes, avec certes un objectif de qualité mais dans un domaine où la qualité est forcément subjective. En aimant écrire pour le fait-même d'écrire.
Ce qui ne veut pas dire que je ne passe pas par les montagnes russes "ce que j'écris est trop nul, bouhouhou"/"wouaaaah, je suis trop contente de ce texte !!!" suivant les retours qu'on a dessus, hein. Mais ça ne se prête pas - dans mon ressenti - à une impression d'imposture, puisque la question de la réussite et de la reconnaissance sociale est exclue de l'équation.

Après, c'est peut-être aussi une question, d'une part, d'habitude (je fréquente des forums d'écriture depuis mes 14 ans : ça a sans doute désacralisé énormément l'image de l'Ecrivain et du Talent, en lesquels je ne crois pas vraiment, pas plus qu'en l'idée qu'il suffit de trouver une mécanique productive pour écrire), et d'autre part, de caractère : je n'ai jamais considéré que la confiance en soi était une qualité (ni un défaut pour autant, mais je ne la valorise pas, humainement parlant. D'ailleurs, son excès (l'arrogance) m'horripile au plus haut point).


En définitive, je préfère en rester à : "fais ce que tu aimes comme tu l'aimes et parce que tu l'aimes" - ce qui implique une forme de perfectionnisme, mais un perfectionnisme qui repose sur la passion de ce qu'on fait et pas sur la poursuite d'une réussite, et qui n'est donc pas douloureux. :pompom:


Encore une fois, malgré l'usage constant du présent de vérité générale dans ce post, je sais bien que ça n'est que l'expression de mon sentiment personnel, je n'en fais pas une règle universelle !
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Edel-Weiss
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Edel-Weiss »

Je me retrouve tellement dans tes propos sur la recherche et le doctorat, Milora. J'ai très mal vécu mon doctorat à cause de ce sentiment d'imposture, le fait de ne pas se sentir légitime, de ne pas se sentir à sa place. Pour cette raison, j'ai abandonné l'idée de travailler dans le milieu universitaire, car c'est vraiment insupportable.

Je pensais ressentir le syndrome de l'imposteur pour l'écriture, mais à la réflexion, en lisant les interventions, je ne pense pas que ce soit le cas. Je me sens tout à fait à ma place quand j'écris, je ne me sens pas illégitime dans mon écriture. Par contre, je ressens beaucoup de peurs vis-à-vis de mon écriture, parce que je me mets la pression inutilement. Pour reprendre l'expression, ça compte tellement pour moi, que j'y mets toutes mes tripes et que j'ai peur que le résultat ne soit pas satisfaisant. En ce moment, je lis Comme par magie d'Elizabeth Gilbert (notamment conseillé par plusieurs grenouilles) et on voit que ce n'est pas du tout quelque chose d'anormal. Le tout, c'est d'aller au-delà de ses peurs, car personne n'écrira jamais à notre place, donc... mieux vaut un livre pas tout à fait à la hauteur de notre espérance que pas de livre du tout ^^
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Sytra »

Edel-Weiss a écrit :
ven. oct. 20, 2017 10:58 am
mieux vaut un livre pas tout à fait à la hauteur de notre espérance que pas de livre du tout ^^
Cest tellement vrai ! Et c'est exactement ce dont j'essaie de me convaincre en ce moment pour aller jusqu'au bout de mon premier jet. (Mais la méthode Coué n'est pas si facile, donc ça fait toujours du bien de se l'entendre rappeler. ^^)
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par desienne »

J'aimerai quand même revenir sur un aspect essentiel de la définition de l'imposture.
Pour moi il existe un aspect essentiel à l'imposture : le fait qu'elle soit pleinement consciente et assumée.
Le vrai imposteur c'est celui qui se sert de l'imposture pour atteindre un but (voler, prendre une identité, usurper une fonction, une place, un titre, un nom ...).
De fait, ça rend difficilement compréhensible le syndrome de l'imposteur qui s'apparente plus, selon moi, à une manque de confiance en soi ou en son travail.
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Sytra »

desienne a écrit :
ven. oct. 20, 2017 3:12 pm
J'aimerai quand même revenir sur un aspect essentiel de la définition de l'imposture.
Pour moi il existe un aspect essentiel à l'imposture : le fait qu'elle soit pleinement consciente et assumée.
Le vrai imposteur c'est celui qui se sert de l'imposture pour atteindre un but (voler, prendre une identité, usurper une fonction, une place, un titre, un nom ...).
De fait, ça rend difficilement compréhensible le syndrome de l'imposteur qui s'apparente plus, selon moi, à une manque de confiance en soi ou en son travail.
AMHA.
Justement, desienne, le vrai syndrome de l'imposteur, c'est se sentir imposteur selon la définition que tu en donnes (alors qu'on ne l'est pas). C'est avoir l'impression d'usurper le titre d'écrivain. On se dit "Tout le monde me croit écrivain (par ex. parce que j'ai publié un ou deux textes), mais je n'en suis pas vraiment un. Il y a forcément quelqu'un qui va se rendre compte que tout ceci n'est qu'une imposture, que je mens aux gens qui croient que je suis écrivain. Je ne mérite pas qu'on me donne ce qualificatif..." :ronge:
(J'aime beaucoup l'anecdote de Neil Gaiman à propos de Neil Armstrong : Armstrong se sent un imposteur quand on le classe dans les gens "importants". Ce classement n'est pas de son fait, mais il a tout de même l'impression d'avoir usurper cette place. D'ailleurs, on ne parlerait pas de "syndrome" si on se comportait en vrais imposteurs. ;) )
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par desienne »

Je suis un peu perplexe quand même (si je puis me permettre).
Armstrong est une personnalité importante, il a été le premier humain a poser le pied sur la Lune, il en avait pleinement conscience en énonçant la phrase que tout le monde connaît.
Il ne peut pas se sentir "réellement" imposteur, ni même nier son rôle historique.
Quand il a posé sa candidature pour être astronaute, il n'a pas usurpé sa place...
De mon point de vue, ça ressemble à une forme de modestie mal placée... (ou alors il n'assume pas son rôle.)

Pour en revenir au syndrome du point de vue écriture tout ce que je lis ici (et ailleurs) m'évoque d'avantage la confiance et la légitimité.
Après, c'est mon point de vue ;-)
En aparté, j'aimerai juste ajouter que nous sommes tous auteur.e.s ici. C'est un fait. Personne n'a à rougir de ce fait, ni penser que c'est faux ou pas légitime pour x ou y raisons. Nous sommes tous des auteure.s (ou autrices :-) ).
Il faut le répéter, le dire, l'affirmer. Vous tous et toutes travaillez dur en ce lieu parce que vous êtes auteur.e.s.
(En fait, vous êtes déjà auteur.e.s avant même de venir ici).

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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Edel-Weiss »

Mais c'est exactement ça. Le syndrome de l'imposteur, c'est manquer de confiance en soi jusqu'au point de se sentir illégitime à la place qu'on occupe. Alors qu'on est tout à fait légitime dans cette occupation. On se sent imposteur alors qu'on ne l'est pas :)

Sytra a écrit :
ven. oct. 20, 2017 12:58 pm
Edel-Weiss a écrit :
ven. oct. 20, 2017 10:58 am
mieux vaut un livre pas tout à fait à la hauteur de notre espérance que pas de livre du tout ^^
Cest tellement vrai ! Et c'est exactement ce dont j'essaie de me convaincre en ce moment pour aller jusqu'au bout de mon premier jet. (Mais la méthode Coué n'est pas si facile, donc ça fait toujours du bien de se l'entendre rappeler. ^^)
J'approuve tout à fait. Personnellement, je suis aussi obligée de me le marteler pour m'en convaincre, car sinon, je me laisse submerger par la peur de ne pas y arriver :ange: (ce qui arrive souvent, même si j'ai beau essayer d'être rationnelle)
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Re: Le syndrome de l'imposteur et la peur de l'échec chez l'écrivain

Message par Elikya »

Oui, le syndrome de l'imposteur c'est justement la différence entre le ressenti d'une personne et un jugement objectif.

Une personne peut se sentir imposteur alors qu'elle ne l'est objectivement pas. Parfois, j'ai envie de me cacher en salon, en me disant que je ne suis pas à ma place, que ceux qui pensent que je suis un auteur se trompent à mon sujet. Pourtant, si n'importe qui exprimait ce sentiment auprès de moi, je lui dirais sans hésiter : tu es un auteur !

Ce n'est pas logique, chez moi c'est une émotion difficilement contrôlable, un peu comme des bouffées d'angoisse. Cela ne m'empêche pas d'écrire, ni de me présenter comme auteur dans certaines situations, mais parfois j'ai envie de regarder derrière mon épaule, comme si quelqu'un allait s'écrier : "Elle vous ment, cette fille n'est pas un auteur !"

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