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Ifuldrita
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Message par Ifuldrita »

Bonjour les grenouilles !

Je me permets d'ouvrir ce sujet car je n'ai pas trouvé l'équivalent. Bien sûr, n'hésitez pas si j'ai commis une bévue :heart:
Je suis actuellement en train d'écrire un projet avec une seule focale (j'ai choisi la troisième personne du singulier, mais ça aurait tout aussi bien être la première). Et je me rends compte qu'avec un seul point de vue, il y a plein de choses concernant les autres personnages et le contexte (passé des personnages, politique, Histoire, ...) qu'il est beaucoup plus difficile de faire passer qu'avec un roman choral.

Pourtant, j'imagine qu'il y a plein d'astuces pour pallier cette faiblesse du pov unique.
Pour l'instant, j'ai pensé à la conversation entre deux personnages entendue à la dérobée, mais on ne peut pas utiliser ce genre de procédé trop de fois sans que ça fasse grosse ficelle.

Est-ce que vous avez des "trucs" pour vous en sortir ?
Merci pour vos retours :love: :love:
Modifié en dernier par Ifuldrita le mer. avr. 05, 2017 9:53 pm, modifié 1 fois.
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Siana
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Message par Siana »

C'est vrai qu'une focalisation centrée sur un personnage en particulier réduit les possibilités de présenter les autres personnages. Si tu penches vers l’omniscient, tu peux encore ajouter des indications dans la narration, mais en complète focalisation interne (que ce soit doncà la 1ère ou à la 3ème personne), on reste dans ce que sait et voit le personnage.

J'ai eu la problématique à la 1ère personne avec mon cycle, où mes alphas on noté que justement on ne voyait pas assez la caractérisation des autres persos, que je présentais par ailleurs un peu trop via le filtre de mon perso (et notamment ses préjugés).

Parmi les techniques que j'ai utilisées pour me défaire un peu de cela, il y a bien les conversations, surtout quand les autres personnages parlent d'eux-même ou racontent leur passé / leurs goûts. Mais j'ajoute d'autres trucs :
- après avoir eu un préjugé, mon personnage se rend compte qu'il s'est trompé en voyant une action du personnage secondaire qui contredit ce préjugé (ou en l'entendant parler d'un truc qui le contredit)
- les actions sont un bon médium de la caractérisation des personnages : l'un peut traîner son oreiller fétiche partout, l'autre passer son temps à lustrer son épée, ou bien accourir dès qu'il faut aider une personne dans le besoin, ou bien bouder/s'énerver sur un sujet en particulier
- les objets peuvent aussi être intéressants du coup pour suggérer la caractérisation, on ne verra pas de la même manière un type qui a une grosse épée d'un autre qui arbore un joli chapeau à plume
- la différence de réaction face à un évènement/objet particulier, parce que ça permet de justement distinguer les personnages en même temps que ça donne un trait de caractère (plutôt méfiant, courageux, timide, etc.)
- les disputes entre les autres, sans forcément impliquer le personnage-point de vue, ça permet aux autres de se libérer, de montrer vraiment comment ils sont, et d'ailleurs cette dispute peut être en partie (ou en majorité) rapportée par la narration si cela permet davantage de détails sur les réactions des persos


De manière générale, j'ai tablé sur les préjugés de mon personnage en 1er lieu, puis en le faisant changer d'avis au fur et à mesure qu'il découvre un peu plus de ses compagnons. De cette manière, le lecteur apprend à connaître les personnages en même temps que le personnage du point de vue et je trouve cette approche intéressante, plus naturelle que d'inclure des descriptions forcées dès le début.

Voilà pour mes expérimentations en la matière, mais je cherche aussi à ajuster ma pratique. Je suis curieuse de voir si d'autres grenouilles ont des idées que je n'ai pas testées également. :wow:

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Ifuldrita
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Re: Ecrire avec un seul point de vue

Message par Ifuldrita »

Merci pour ton retour, Siana, c'est très intéressant.
Siana a écrit :
mer. avr. 05, 2017 9:48 pm
les disputes entre les autres, sans forcément impliquer le personnage-point de vue, ça permet aux autres de se libérer, de montrer vraiment comment ils sont, et d'ailleurs cette dispute peut être en partie (ou en majorité) rapportée par la narration si cela permet davantage de détails sur les réactions des persos
Donc même s'il n'est pas acteur du moment, tu t'arranges pour qu'il assiste à la dispute. Tu as des astuces particulières pour ça ?
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Re: Ecrire avec un seul point de vue

Message par Alamankarazieff »

Après un livre comme l'Assassin Royal est un magnifique exemple de comment cette limitation peut être une force. En voyant tout par les yeux de Fitz, il y a plein de choses qu'on découvre au fur et à mesure et ça donne un vrai plaisir (je pense au fait que les femmes le regardent et le trouvent beaux, ce dont lui ne se rend effectivement pas compte, ou la scène au début du deuxième tome où il arrive en ville sans se rendre compte qu'il est hirsute, sale et dépenaillé.)
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Elikya
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Re: Ecrire avec un seul point de vue

Message par Elikya »

Alamankarazieff a écrit :
mer. avr. 05, 2017 11:08 pm
Après un livre comme l'Assassin Royal est un magnifique exemple de comment cette limitation peut être une force. En voyant tout par les yeux de Fitz, il y a plein de choses qu'on découvre au fur et à mesure et ça donne un vrai plaisir (je pense au fait que les femmes le regardent et le trouvent beaux, ce dont lui ne se rend effectivement pas compte, ou la scène au début du deuxième tome où il arrive en ville sans se rendre compte qu'il est hirsute, sale et dépenaillé.)
J'écris beaucoup à la première personne et au présent, parfois avec un seul personnage point de vue (comme dans Iceltane) parfois avec deux points de vue différents. J'aime cette narration, parce qu'elle implique une immersion totale dans la tête du personnage, de ses sensations et ses pensées.

Comme Alamankazarieff, je trouve très intéressant que le personnage et sa narration ne soient pas objectifs, le personnage interprête à sa façon ce qui l'entoure. Il commet des erreurs et son point de vue peut être l'occasion de puissante ironie dramatique : le lecteur dispose des mêmes infos que le personnage, mais il a plus de recul, moins de préjugés, donc il peut sentir que le personnage interprête mal une situation, se met dans le pétrin, etc.

Pour décrire les autres personnages en profondeur, j'essaie de prévoir le maximum d'interactions et de conflits avec le personnage principal. S'il existe un conflit, ils vont forcément lutter, se disputer, monter des stratégies, et donc dévoiler leur personnalité. Quelles sont leurs valeurs ? Quelles sont leurs attaches ? Quelles sont leurs faiblesses ? Et maintenant battez-vous...
:wamp:

Je ne suis pas en train de dire qu'il faut des disputes et des scènes d'action à chaque page, mais c'est important à mon avis que les personnages ne défendent pas les mêmes valeurs morales, du moins au départ. Ainsi, leurs dialogues montreront ce décalage, cette vision différente du même univers, ce qui aidera le lecteur à mieux les comprendre. J'aime beaucoup A nalyse du scénario de Truby, de ce point de vue. Il y explique notamment que, selon lui, un personnage secondaire et est personnage confronté au même dilemne moral que le personnage principal, mais qui ne fait pas le même choix que le personnage principal. Ainsi, il est possible de montrer où mène cette autre alternative morale.

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Re: Ecrire avec un seul point de vue

Message par Ifuldrita »

Merci pour vos réponses :heart:

Je suis tout à fait d'accord avec vous sur les intérêts du point de vue unique :heart: Je ne me rappelais pas que l'Assassin royal était écrit comme ça, j'irai relire des passages à l'occasion :)

Pour la caractérisation des personnages en elle-même, je n'ai pas trop de difficulté. Effectivement, on en montre beaucoup au travers des réactions et des paroles.

Mon problème est plus au niveau de leur passé : dans la vraie vie, on ne raconte pas sa petite enfance ou les choses qui nous ont blessés très souvent. Est-ce la même chose dans un livre (j'aurais tendance à penser que oui, sinon j'ai peur que ça ait l'air artificiel) ? Comment faire découvrir cela au narrateur de façon pas trop "gros sabot" aux yeux du lecteur ?
Peut-on maintenir ce cap de la monofocale quand on a un adversaire qui ne se trouve pas au même endroit que le narrateur, sans qu'on ait l'impression qu'il est catapulté à la fin du roman ?
Et pour les événements qui ont lieu autour du narrateur : il n'est pas forcément témoin de tout, les gens discutent aussi quand il n'est pas là. Est-ce que cela ne fait pas artificiel si justement on l'amène à y assister ?
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Message par Crazy »

Ifuldrita a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 7:09 am
Mon problème est plus au niveau de leur passé : dans la vraie vie, on ne raconte pas sa petite enfance ou les choses qui nous ont blessés très souvent. Est-ce la même chose dans un livre (j'aurais tendance à penser que oui, sinon j'ai peur que ça ait l'air artificiel) ? Comment faire découvrir cela au narrateur de façon pas trop "gros sabot" aux yeux du lecteur ?
- ton narrateur peut soupçonner que A a eu des malheurs
- il peut supposer ça aussi parce que B se comporte pareil et qu'il sait ce qui est arrivé à B
- au bout d'un long moment (le temps que la confiance se construise) A peut finir par raconter son histoire
- C, qui connaît bien A, peut raconter son histoire au narrateur...
- pour une raison quelconque, ça peut être écrit qqpart et ton narrateur tombe sur l'info
- ...
;)
Peut-on maintenir ce cap de la monofocale quand on a un adversaire qui ne se trouve pas au même endroit que le narrateur, sans qu'on ait l'impression qu'il est catapulté à la fin du roman ?
Moins évident, mais tu peux avoir des persos secondaires ailleurs qui remarquent des trucs et informent ton narrateur, et celui-ci tire des conclusions.
Et pour les événements qui ont lieu autour du narrateur : il n'est pas forcément témoin de tout, les gens discutent aussi quand il n'est pas là. Est-ce que cela ne fait pas artificiel si justement on l'amène à y assister ?
Ca fait artificiel si la raison de sa présence ne fait pas naturel ;)
Et encore une fois, ça peut être un autre perso qui assiste et lui fait un résumé ^^

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Elikya
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Re: Ecrire avec un seul point de vue

Message par Elikya »

En effet, si ton adversaire est physiquement éloigné de ton personnage principal, ce n'est pas facile de créer des interactions entre eux.
Tu peux utiliser le biais de documents : téléphone, mail, messages écrits, journeaux, archives, ou le biais de personnages intermédiaires, comme le dit Crazy (des adversaires secondaires par exemple).

Je me méfie des ficelles trop visibles qui font que comme par hasard, le narrateur assiste à une discusssion qui le concerne, ou à une discussion stratégique, ou pire encore, les personnages qui divaguent tout haut dans leur rêve, ou qui perdent la mémoire au moment voulu avant de la retrouver au moment voulu.
Par contre, ton personnage principal pourrait peut-être mener son enquête. Dans ce cas, il semble naturel qu'il écoute les conversations, qu'il cherche à tirer les vers du nez, qu'il trouve des informations. De passif, il devient actif, ce qui rend les choses plus vraisemblables et plus intéressantes.

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Morgane
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Message par Morgane »

- Je réagis sur un point concernant l'antagoniste:

A mon sens, il faut que le protagoniste se trouve au centre du conflit. C'est sa définition même. S'il l'a provoqué, il s'agit d'un conflit interne, et c'est bingo. Mais si c'est un conflit externe qui lui tombe dessus, ce n'est pas un souci, s'il est celui qui le résout (ou le subit).

Donc si ton antagoniste se trouve au loin, et qu'il perd, ou gagne, sans intervention volontaire du protagoniste, cela risque de ne pas fonctionner, car ton protagoniste ne l'aura pas vécu, et du coup le lecteur non plus. Mais ça ne fonctionnerait pas bien avec une multi-focale non plus, à moins que l'un des protagonistes soit au cœur du conflit.

Un exemple: Sauron ne croise jamais la route des Hobbits. C'est un grand Antagoniste. Mais c'est l'action des hobbits qui le conduit à sa perte (tu as une multi-focale, mais tu aurais pu ne pas en avoir pour cette intrigue), et ils vivent un maximum de conflit pour y arriver. Donc ça fonctionne. S'ils avaient juste voulu se débarrasser de l'anneau sans savoir qu'il appartenait à Sauron, ça n'aurait pas fonctionné, les enjeux auraient été trop faibles et le lien pas assez évident. ça aurait marché d'un point de vue intrigue, mais pas d'un point de vue récit.

Du coup, pour répondre à ta question, je ne sais pas si les informations dont disposent le protagonistes sont nécessairement le problème, mais peut-être qu'il est trop extérieur à ta trame et que si tu le rapproches du centre de l'intrigue, ça résoudra ce souci de lui-même.

- Pour le passé des personnages secondaires, j'ai envie de dire qu'on s'en fiche un peu. En tant que lecteur, certaines bribes d'informations me suffisent pour cerner la personnalité, le pourquoi. Si toi tu maîtrises leur historique, la caractérisation fera le reste. Si tu vas trop dans le détail, ça risque de paraître artificiel, et c'est justement une des forces de la narration avec un seul point de vue interne. ça laisse le lecteur imaginer, relier les morceaux, et le met au même point de questionnement que le protagoniste. Il faut en donner, mais des sous-entendus, des commentaires suffisent souvent et font mieux leur office que de creuser. Et après, si ton personnage est vraiment étranger, il peut poser des questions, et se renseigner, et faire des déductions.

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Message par NaNa »

Dorian Lake a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 8:46 am
Pour le passé des personnages secondaires, j'ai envie de dire qu'on s'en fiche un peu. En tant que lecteur, certaines bribes d'informations me suffisent pour cerner la personnalité, le pourquoi. Si toi tu maîtrises leur historique, la caractérisation fera le reste. Si tu vas trop dans le détail, ça risque de paraître artificiel, et c'est justement une des forces de la narration avec un seul point de vue interne.
+1. Je pense que quand on écrit avec une seule focale, il faut accepter qu'on ne pourra pas tout dire de tous les personnages, et surtout pas tout de suite. Ce qu'il y a de bien, c'est qu'on peut découvrir les personnages au fur et à mesure, ou bien rester dans le mystère. Je pense que le Fou de l'assassin royal est le meilleur exemple. On le découvre un peu plus à chaque tome, mais on sait finalement peu de choses sur lui (ou elle? :D ). Ca ne l'empêche pas d'être un des personnages les mieux construits et les plus appréciés du livre. Et d'ailleurs, je pense que i on avait un jour toutes les réponses le concernant, ça nous gâcherait un peu le personnage.
Après, si tu veux vraiment parler de leur passé, tu peux amener les personnages à en parler quand ils se connaissent suffisamment, ou d'autres peuvent raconter l'histoire aux héros.
Ifuldrita a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 7:09 am
Et pour les événements qui ont lieu autour du narrateur : il n'est pas forcément témoin de tout, les gens discutent aussi quand il n'est pas là. Est-ce que cela ne fait pas artificiel si justement on l'amène à y assister ?
Ca dépend des cas. Pour reprendre le cas de l'assassin royal, Fitz passe son temps à espionner les conversations des autres dans le deuxième cycle, mais c'est pas gênant parce que c'est son travail. Ce qui est vraiment artificiel, c'est quand ton héros passe dans le coin et, comme par hasard, entend quelqu'un prononcer son nom et décide d'aller écouter. Une fois, ça va. Mais quand ça arrive trop souvent, on en vient à se demander si le héros n'est pas pourvu d'un radar qui le pousse vers toutes les conversations où son nom est mentionné.
Si le but est de donner des informations au lecteur, il y a aussi d'autres trucs. Je pense à Harry Potter : Harry n'est pas témoin de tout ce qu'il peut se passer, mais le journal lui apporte de informations sur ce qui se passe à l'extérieur de Poudlard. Il voit aussi Vous-Savez-Qui dans ses rêves, mais bon, tout le monde n'a pas le luxe d'avoir un tel lien avec le grand méchant...
Ifuldrita a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 7:09 am
Peut-on maintenir ce cap de la monofocale quand on a un adversaire qui ne se trouve pas au même endroit que le narrateur, sans qu'on ait l'impression qu'il est catapulté à la fin du roman ?
Je pense qu'il faut s'assurer que même s'il n'est pas là, l'adversaire paraisse bien présent dans l'esprit du lecteur. Par exemple, en en parlant ou en montrant ses actions. Dans le tome 1 d'Harry Potter, on ne rencontre Voldemort qu'à la fin, mais en parle pendant tout le roman. Du coup, quand Harry le rencontre, ça n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe.
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Siana
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Message par Siana »

Ifuldrita a écrit :
mer. avr. 05, 2017 9:55 pm
Merci pour ton retour, Siana, c'est très intéressant.
Siana a écrit :
mer. avr. 05, 2017 9:48 pm
les disputes entre les autres, sans forcément impliquer le personnage-point de vue, ça permet aux autres de se libérer, de montrer vraiment comment ils sont, et d'ailleurs cette dispute peut être en partie (ou en majorité) rapportée par la narration si cela permet davantage de détails sur les réactions des persos
Donc même s'il n'est pas acteur du moment, tu t'arranges pour qu'il assiste à la dispute. Tu as des astuces particulières pour ça ?
Bah dans mon cas c'est assez facile puisque puisqu'il s'agit d'un voyage et qu'il y a plein de raisons plus ou moins absurde à ce que machin ait perdu ses chaussettes par la faute de truc ou que le repas soit cramé parce que bidule sait pas faire à manger. ^^ Mais le personnage principal peut aussi y participer, pour moi l'intérêt c'est surtout de voir la différence de réactions entre les différents personnages qui y participent.
Ifuldrita a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 7:09 am
Mon problème est plus au niveau de leur passé : dans la vraie vie, on ne raconte pas sa petite enfance ou les choses qui nous ont blessés très souvent. Est-ce la même chose dans un livre (j'aurais tendance à penser que oui, sinon j'ai peur que ça ait l'air artificiel) ? Comment faire découvrir cela au narrateur de façon pas trop "gros sabot" aux yeux du lecteur ?
Peut-on maintenir ce cap de la monofocale quand on a un adversaire qui ne se trouve pas au même endroit que le narrateur, sans qu'on ait l'impression qu'il est catapulté à la fin du roman ?
Et pour les événements qui ont lieu autour du narrateur : il n'est pas forcément témoin de tout, les gens discutent aussi quand il n'est pas là. Est-ce que cela ne fait pas artificiel si justement on l'amène à y assister ?
C'est vrai qu'ici c'est plus délicat à manier. J'utilise parfois des dialogues, genre mes personnages interrogent les gens du coin où ils débarquent pour en savoir plus, ou pour comprendre les coutumes locales (ils peuvent aussi se faire engueuler pour y manquer de respect par ignorance).
Je manie aussi beaucoup l'introspection de mon personnage pour qu'il remarque tel défaut d'un compagnon et qu'il suppute un vieux trauma d'enfance (ça se devine surtout à la répétition du défaut, avec ses variantes, je trouve). Comme par exemple, j'ai un perso qui vend du rêve aux femmes parce sa famille espère le marier, mais à force de le voir se pavaner sans passer à l'action, mon personnage-point de vue se doute que finalement les femmes ne l'intéressent pas. Et les soucis d'enfance se révèlent généralement à force de détails dans ce genre, petit à petit, de déduction en déduction, en ajoutant quelques menus aveux des personnages eux-mêmes pour préciser leur situation.
Concernant le méchant, j'ai aussi cette problématique et finalement j'ai repris la "technique Sauron" : on ne le voit jamais en conflit direct avec les personnages principaux et pourtant sa noirceur est palpable et s'étend malgré tout. Pour cela, je joue sur l'ambiance (ragots, passer près de villages pillés/ruinés, croiser des survivants blessés, des camps d'armée "gentille" en garnison, de nouveau postes de sécurité), ainsi que des sbires qui répandent la mort sur leur passage (comme les Nazgûl du SdA, qui sont l'incarnation d'un ennemi direct qui cherche à atteindre les héros, ou les orcs ensuite avec carrément une armée). Ainsi, leur "maître" gagne une présence, le lecteur peut imaginer sa puissance et sa carrure. Parfois, ce que l'on ne peut ni voir ni affronter directement est plus horrible que tout le reste. C'est en tout cas l'intention derrière le développement de l'ambiance (comme une forme de "préparation", quand l'apparition du maître est un "paiement", si je reprends la technique d'Yves Lavandier... en tout cas ça y ressemble).

Edit : bon, en fait je rejoins pas mal les deux derniers postes, mais au moins on se complète. ^^

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Ifuldrita
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Message par Ifuldrita »

Merci pour vos réponses très éclairantes :ampoule:

Elikya a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 7:54 am
Par contre, ton personnage principal pourrait peut-être mener son enquête. Dans ce cas, il semble naturel qu'il écoute les conversations, qu'il cherche à tirer les vers du nez, qu'il trouve des informations. De passif, il devient actif, ce qui rend les choses plus vraisemblables et plus intéressantes.
Effectivement, du coup le narrateur devient beaucoup plus intéressant.

Dorian Lake a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 8:46 am
Donc si ton antagoniste se trouve au loin, et qu'il perd, ou gagne, sans intervention volontaire du protagoniste, cela risque de ne pas fonctionner, car ton protagoniste ne l'aura pas vécu, et du coup le lecteur non plus. Mais ça ne fonctionnerait pas bien avec une multi-focale non plus, à moins que l'un des protagonistes soit au cœur du conflit.

Un exemple: Sauron ne croise jamais la route des Hobbits. C'est un grand Antagoniste. Mais c'est l'action des hobbits qui le conduit à sa perte (tu as une multi-focale, mais tu aurais pu ne pas en avoir pour cette intrigue), et ils vivent un maximum de conflit pour y arriver. Donc ça fonctionne. S'ils avaient juste voulu se débarrasser de l'anneau sans savoir qu'il appartenait à Sauron, ça n'aurait pas fonctionné, les enjeux auraient été trop faibles et le lien pas assez évident. ça aurait marché d'un point de vue intrigue, mais pas d'un point de vue récit.
Très intéressant, et ton exemple sur Sauron est très parlant !

Dorian Lake a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 8:46 am
- Pour le passé des personnages secondaires, j'ai envie de dire qu'on s'en fiche un peu. En tant que lecteur, certaines bribes d'informations me suffisent pour cerner la personnalité, le pourquoi. Si toi tu maîtrises leur historique, la caractérisation fera le reste. Si tu vas trop dans le détail, ça risque de paraître artificiel, et c'est justement une des forces de la narration avec un seul point de vue interne. ça laisse le lecteur imaginer, relier les morceaux, et le met au même point de questionnement que le protagoniste. Il faut en donner, mais des sous-entendus, des commentaires suffisent souvent et font mieux leur office que de creuser. Et après, si ton personnage est vraiment étranger, il peut poser des questions, et se renseigner, et faire des déductions.
C'est exactement ce que je voulais savoir (sans que j'aie réussi à formuler la question :mrgreen: ). Merci pour ce retour ! Cela résout pas mal de problèmes :)

Nana a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 9:27 am
Si le but est de donner des informations au lecteur, il y a aussi d'autres trucs. Je pense à Harry Potter : Harry n'est pas témoin de tout ce qu'il peut se passer, mais le journal lui apporte de informations sur ce qui se passe à l'extérieur de Poudlard.
Nana a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 9:27 am
Je pense qu'il faut s'assurer que même s'il n'est pas là, l'adversaire paraisse bien présent dans l'esprit du lecteur. Par exemple, en en parlant ou en montrant ses actions. Dans le tome 1 d'Harry Potter, on ne rencontre Voldemort qu'à la fin, mais en parle pendant tout le roman. Du coup, quand Harry le rencontre, ça n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe.
Très juste, merci pour ces exemples :heart: Ca me permet d'y voir plus clair.

Siana a écrit :
jeu. avr. 06, 2017 5:37 pm
Je manie aussi beaucoup l'introspection de mon personnage pour qu'il remarque tel défaut d'un compagnon et qu'il suppute un vieux trauma d'enfance (ça se devine surtout à la répétition du défaut, avec ses variantes, je trouve). Comme par exemple, j'ai un perso qui vend du rêve aux femmes parce sa famille espère le marier, mais à force de le voir se pavaner sans passer à l'action, mon personnage-point de vue se doute que finalement les femmes ne l'intéressent pas. Et les soucis d'enfance se révèlent généralement à force de détails dans ce genre, petit à petit, de déduction en déduction, en ajoutant quelques menus aveux des personnages eux-mêmes pour préciser leur situation.
Concernant le méchant, j'ai aussi cette problématique et finalement j'ai repris la "technique Sauron" : on ne le voit jamais en conflit direct avec les personnages principaux et pourtant sa noirceur est palpable et s'étend malgré tout. Pour cela, je joue sur l'ambiance (ragots, passer près de villages pillés/ruinés, croiser des survivants blessés, des camps d'armée "gentille" en garnison, de nouveau postes de sécurité), ainsi que des sbires qui répandent la mort sur leur passage (comme les Nazgûl du SdA, qui sont l'incarnation d'un ennemi direct qui cherche à atteindre les héros, ou les orcs ensuite avec carrément une armée). Ainsi, leur "maître" gagne une présence, le lecteur peut imaginer sa puissance et sa carrure. Parfois, ce que l'on ne peut ni voir ni affronter directement est plus horrible que tout le reste. C'est en tout cas l'intention derrière le développement de l'ambiance (comme une forme de "préparation", quand l'apparition du maître est un "paiement", si je reprends la technique d'Yves Lavandier... en tout cas ça y ressemble).
Très intéressant, tout ça. En tout cas, le lire noir sur blanc m'aide beaucoup à retrouver mes petits. Je :stylo:
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Stef-
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Message par Stef- »

Salut Ifuldrita !

Comme autres exemples (mais à la 1ère personne) tu as aussi la trilogie Hunger Games (3 romans, 1 seul pdv !) et Zoo City de Lauren Beukes (si tu ne l'as pas lu et que tu aimes les narrations très internes et vivantes, fonce, pour moi, c'est un cran au-dessus)

Je suis d'accord avec Elikya, la force, c'est souvent de caractériser les personnages secondaires au travers du filtre du protagoniste.

Parfois, c'est aussi faire imaginer, laisser supposer. L'intérêt est de se poser les mêmes questions que le personnage de pdv, mais avec un peu d'ironie dramatique aussi (qu'on comprenne au moins autant, si ce n'est plus, que le personnage de pdv, pour se trouver dans une situation "de confort")

En fait, pourquoi ne pas prendre le problème dans l'autre sens ? Oui avec un pdv interne unique, la narration va passer à côté de plein de détails "hors champs". Mais c'est le but, non ? Sinon tu écrirais un roman multi pdv justement.
Personnellement, quand je réfléchis à un projet, la question des pdv de narration vient quasiment dans les premières idées. Elle va conditionner tout le reste. J'ai plutôt envie d'essayer de bâtir un roman autour d'un ou plusieurs pdv, plutôt que l'inverse. Et de voir comment avec ce choix de narration je peux construire une histoire intéressante ?
Il y a des avantages et des inconvénients dans tous les cas (plusieurs pdv, ce n'est pas plus simple, loin de là.)

Bon courage en tout cas ! :)

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Re: Ecrire avec un seul point de vue

Message par Ifuldrita »

Stef- a écrit :
sam. avr. 08, 2017 7:03 am
Comme autres exemples (mais à la 1ère personne) tu as aussi la trilogie Hunger Games (3 romans, 1 seul pdv !) et Zoo City de Lauren Beukes (si tu ne l'as pas lu et que tu aimes les narrations très internes et vivantes, fonce, pour moi, c'est un cran au-dessus)
Je ne connais pas du tout zoo City. Même Hunger games, je ne savais pas du tout que c'était en pov unique ! Ce sera très intéressant de le comparer avec le film, où l'on suit de temps en temps les personnages secondaires.

Stef- a écrit :
sam. avr. 08, 2017 7:03 am
En fait, pourquoi ne pas prendre le problème dans l'autre sens ? Oui avec un pdv interne unique, la narration va passer à côté de plein de détails "hors champs". Mais c'est le but, non ? Sinon tu écrirais un roman multi pdv justement.
Personnellement, quand je réfléchis à un projet, la question des pdv de narration vient quasiment dans les premières idées. Elle va conditionner tout le reste. J'ai plutôt envie d'essayer de bâtir un roman autour d'un ou plusieurs pdv, plutôt que l'inverse. Et de voir comment avec ce choix de narration je peux construire une histoire intéressante ?
C'était tout à fait ma démarche :) Quand j'ai pensé à mon projet actuel, c'était clairement un seul point de vue. C'est juste que je me galère un peu sur la façon de le faire ^^ Mais j'ai de bonnes pistes pour y arriver, maintenant !

Merci pour ton message, Stef :)
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Re: Ecrire avec un seul point de vue

Message par Stef- »

Ifuldrita a écrit :
dim. avr. 09, 2017 5:52 pm
Stef- a écrit :
sam. avr. 08, 2017 7:03 am
Comme autres exemples (mais à la 1ère personne) tu as aussi la trilogie Hunger Games (3 romans, 1 seul pdv !) et Zoo City de Lauren Beukes (si tu ne l'as pas lu et que tu aimes les narrations très internes et vivantes, fonce, pour moi, c'est un cran au-dessus)
Je ne connais pas du tout zoo City. Même Hunger games, je ne savais pas du tout que c'était en pov unique ! Ce sera très intéressant de le comparer avec le film, où l'on suit de temps en temps les personnages secondaires.
Les films sont très fades à côté du livre, où la narration est voulue intimiste et percutante. Maintenant, j'ai lu cette trilogie sans trop savoir de quoi il s'agissait, et avant les films. Peut-être mon avis évoluerait. Avec le recul, je préfère de loin un roman comme Zoo City. :)

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