Je pense que le point de vue se définit par un ensemble de phrases - pour une (partie de) scène. Prise hors contexte, une phrase - voire 2 ou 3 - peut donc appartenir à plusieurs points de vue.
Autrement dit, pour une phrase donnée, il n'y a pas de de point de vue unique, et les ressentis de chacun sur "qui parle" sont tous valides même s'ils sont différents.
Dans l'exemple de timioko :
"Il vit avec horreur ce traitre de Paul avaler le dernier cookies, avec un air goguenard. «Comment a-t-il osé me faire une chose pareil?», fulminait-t-il toujours, quelque heures plus tard, incapable d'oublier ce détestable souvenir. "
Mon premier ressenti est un point de vue interne, comme Umanimo. Peut-être parce que je lis essentiellement des histoires avec ce point de vue, donc j'ai tendance à l'attribuer.
Mais si je m'y arrête ou qu'on me dit que c'est de l'omniscient, aucun problème effectivement pour moi de le lire sous cet angle.
Les 2 points de vue sont donc corrects pour moi : un omniscient sait ce qui se passe dans la tête de celui qui n'a pas mangé les cookies, tout comme celui-ci.
C'est en lisant ce qui se passe avant et/ou après ces phrases que je pourrai véritablement savoir si je suis en interne ou non. Je dis "je", car, selon les lecteurs, les ressentis peuvent continuer à diverger un certain temps.
Bref, c'est en considérant tout un ensemble de phrases - une scène ou une partie de scène - que peut se poser un problème de désorientation pour certains lecteurs, un problème de point de vue, quoi. Et, je pense que cette désorientation ne vient pas particulièrement de la structure grammaticale des phrases, mais de leur contenu : si tout ou presque est envisageable d'un point de vue interne, ce qui ne l'est pas va détonner et faire croire à un dérapage vers un point de vue omniscient.
Si, au goût de l'auteur, trop de lecteurs n'ont pas compris quel était le point de vue que, lui, désirait, c'est à lui de les ré-orienter en reformulant certaines phrases.
Pour obtenir un point de vue omniscient, par exemple, moins laisser la caméra sur l'épaule d'un seul personnage.
Pour instituer un point de vue interne, un bon truc proposé par Sherkhann il y a quelques temps, est d'écrire le texte à la première personne. L'auteur, en se mettant ainsi dans la tête du narrateur, se perdra moins lui-même dans ce qui est "racontable" (visible, ressenti,...) par le dit narrateur. Il y a moins de chance qu'il écrive des choses que le narrateur ne peut pas savoir ou auxquelles il ne peut pas s'intéresser à ce moment-là.
Ensuite, il n'y a plus qu'à passer le texte à la 3e personne (les "je" deviennent "il/elle", les "nous" deviennent ils/elles,...)
Et il y aussi la gestion des changements de point de vue. Si l'auteur veut changer de point de vue, il faut que le lecteur s'en rende compte très vite.
Le saut de ligne entre 2 (parties de) scènes est effectivement très utilisé. Il est souvent solidifié par le début du nouveau paragraphe qui a intérêt à être le moins ambigu possible sur le nouveau point de vue pour que celui-ci s'instaure tout de suite pour le lecteur.
Sans saut de ligne, je trouve que c'est très délicat de faire passer une majorité de lecteurs d'un point de vue interne à un autre, mais il y a des auteurs qui y arrivent.
Ce qui est plus facile selon moi, c'est d'être plus ou moins profond dans un même point de vue interne - de très interne à presque externe.
Ca pourrait être le cas de l'exemple de Timioko en considérant qu'il s'agit d'un point de vue interne : la 1ère phrase est dans le ressenti profond, non verbalisé du narrateur, la citation exprime une pensée consciente, verbale.
Le truc, c'est que plongé dans sa lecture, le lecteur (ou le moins possible de lecteurs) ne doit pas se rendre compte de ces fluctuations : tout doit lui sembler couler de source.