D’abord, je tiens à bien préciser ce que j’appelle présent de narration. Il ne s’agit pas d’un roman qui serait écrit entièrement au présent de l’indicatif, mais bien de passages plus ou moins longs que l’on pourrait rencontrer dans une narration classique imparfait/passé simple.
Je pose la question car, il m’arrive fréquemment de recourir à ce procédé, surtout dans les scènes d’action où les événements semblent se bousculer pour le narrateur. On me l’a fait remarquer à juste titre pour un passage où il n’était pas justifié. Du coup, cela m’a permis de me rendre compte que je l’utilisais beaucoup. Je peux donner un petit exemple (inventé pour l’occasion) de cet emploi pour celles et ceux auxquels cette notion n’évoque rien.
« Il faisait très beau ce jour-là et je décidai d’aller écrire dans un square près de chez moi. Mais les ardeurs du soleil m’indisposèrent rapidement et m’obligèrent à rechercher le couvert des arbres. J’étais lancé dans mon travail et indifférent à tout ce qui m’entourait. Soudain, une fiente de pigeon s’écrase sur ma chaussure. Je me penche pour la nettoyer avec un Kleenex et mon carnet dégringole à mes pieds. Voilà mon travail réduit à néant ! Le retour à la réalité était pénible. Quelques rires s’élevaient autour de moi. Furieux, je me mis à lancer quelques cailloux en direction des garnements qui déguerpirent sans demander leur reste. »
On peut bien sûr rédiger tout ce paragraphe avec une alternance imparfait/passé simple. L’emploi du présent n’est là que pour renforcer la surprise et la déception du personnage. C’est comme cela que je le conçois. Mais il me semble que cela déstabilise certains lecteurs. D’où ma question initiale : cet effet est-il devenu ringard ?

J’ai l’impression pourtant qu’il n’a pas disparu totalement du monde de l’écriture. J’ai tenté de retrouver des passages dans mes lectures, mais sans succès. Il est vrai que dans les littératures SFFF, on le rencontrera peu, vu qu’il s’agit souvent de traductions et qu’en anglais cette tournure n’a pas l’air très courante ou n’existe peut-être même pas. Beaucoup d’écrivains francophones ont tendance de plus en plus à calquer leur prose sur le style anglo-saxon.
Je trouve dommage que ce procédé tombe peu à peu dans l’oubli. Certes, il ne faut pas en abuser, mais il me semble encore bien adapté dans certaines situations. Pour rendre plus vivant un rêve ou un cauchemar par exemple, alors que le lecteur sait très bien qu’il s’agit là d’un fait passé, au cœur de la narration générale.
Est-ce qu’il vous arrive de l’employer et dans quelles circonstances ? Ou alors pensez-vous qu’il faille écarter ce procédé au bénéfice d’une lisibilité plus évidente ?

Vos avis sont importants, car j’entre dans une phase de correction de mon roman tout juste achevé et cela fait partie de mon cahier des charges.